Collation pour une décollation

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Collation pour une décollation

Messagede bajotierra le Ven 21 Jan 2011 10:16

Collation pour une décollation

Le 21 janvier 1793 en exécutant louis XVI les révolutionnaires mettaient fin à 1000 ans de tyrannie. Hier comme aujourd’hui aucun n’est assuré de nous opprimer impunément . Le 14 janvier 2011 en Tunisie un autre dictateur ( que les experts pensaient inamovibles) vient de tomber. Le 21 janvier 2011, date d’anniversaire de l’exécution du " Roi de France" et donc pour nous une occasion de doublement se réjouir. Nous vous invitons à "tirer les rois" le 21 janvier à 20H00 au 2 Rue St Jean.

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Re: Collation pour une décollation

Messagede bajotierra le Mer 26 Jan 2011 16:39

TIRONS LES ROIS


« Je ne connais point l’humanité qui égorge les peuples et qui pardonne aux despotes » Maximilien Robespierre, Convention, séance du 16 janvier 1793

Peut-être, alors que nous venons de finir la période « des fêtes », serait-il temps de faire œuvre d’iconoclaste et de repenser la signification du choix officiel des jours de fête par le Pouvoir. Par ce biais, que d’aucuns nommeraient « culturel », puisque on met désormais ce terme à toutes les sauces, le Pouvoir démontre en définitive qu’il est le maître de la mémoire éphéméride et ce faisant, il affirme encore et toujours sa prédominance idéologique. C’est quelque chose de souvent constaté en matière religieuse, mais c’est également vrai en ce qui concerne les événements historiques.

Comme le choix des heures de travail, de repos, d’été ou d’hiver, celui des « jours de gloire », même s’ils sont les bienvenus parce qu’on peut se reposer, n’est jamais anodin. Cette maîtrise du calendrier est une autre manifestation de la domination de l’idéologie capitaliste, ainsi propagée et défendue par l’État, puisque, avec elle, va triompher sa vision des faits historiques. De plus, elle insinue de la sorte l’idée qu’elle posséderait une capacité morale à juger du bien et du mal.

Constatons que pour parvenir à ce paradigme, qui explique que les actes des exploités seront à l’envi oubliés ou caricaturés suivant les critères des exploiteurs, comme ce fut le cas en 2005 pour la révolte dans les banlieues, il a fallu créer toute une batterie de considérations « morales » souvent frappées du sceau des « sciences humaines », qui, en se vautrant dans la « tolérance » et le « pacifisme » comme le cochon dans la confiture, ont érigé une nouvelle version de l’humanisme. Au final, ce dernier consent parfois à s’émouvoir du sort qui est fait aux populations... Mais il en condamnera toujours, sans aucune nuance, leurs actes de violence lorsqu’elles en viennent à se révolter. Toutes ces raisons ont forgé dans l’esprit de tout un chacun un espèce de réflexe pavlovien.

Ce qui fait par exemple que l’idée de célébrer en ces jours épiphanesques la décapitation publique du Roi de France passe immanquablement aux yeux de l’opinion générale pour une monstruosité odieuse et sanguinaire. Et bien, dans un monde où le capitalisme se taille la part du lion grâce à une interminable série de forfaits qui ont pour résultat de réduire à une misère souvent mortelle (au sens le plus direct du terme) des millions d’être humains, voilà un paradoxe qui mérite d’être souligné comme une illustration des fruits modernes de cette bienpensance de crocodiles.

On peut justement observer l’efficacité contemporaine de cette dernière, dans les débats qui ont porté sur la condamnation des épisodes de violence révolutionnaire lors de la Révolution française. A ce moment c’est bien le Peuple, les paysans des villages, les prolétaires des villes [1], qui est passé massivement à l’action, mais pour l’essentiel, ce n’est pas lui qui a écrit cette histoire, c’est la bourgeoisie, dont les élites ont largement pu commenter ces événements en faveur des possédants [2].

A considérer l’importance de cette mythologie de 1789 sur la construction des institutions politiques actuelles, qui s’en réclament les héritières alors que leur but n’est que de faciliter l’exploitation et l’injustice sociale, on peut noter que si toute une prose livresque n’avait pris le soin de dénaturer le sens de cette période, ces institutions seraient perçues, à fort juste titre, comme étant contre-nature. Ce faisant on ne s’étonnera pas que ce qui a couvert les crimes de la bourgeoisie industrielle d’hier et ceux du capitalisme mondialisé aujourd’hui, c’est cette récupération d’un vocabulaire inspiré de la Révolution, tel le célèbre triptyque gravé sur le fronton de toutes les mairies de France et de Navarre, en décalage total avec la réalité du quotidien.

Rappelons donc que, si l’aristocratie a reculé de façon définitive en abandonnant ses privilèges dès l’été de 1789, on le doit aux châteaux et titres de propriété brûlés dans les campagnes et aux quelques nobles lynchés, certes avec peu de délicatesse, dans les villes. Pourtant on constate à la lecture de la plupart des ouvrages s’y rapportant que la violence révolutionnaire est considérée au mieux comme un coup de folie, au pire comme le mal absolu. Le point d’orgue de cette indignation d’opérette, c’est l’exécution de Louis XVI, avec toute une cohorte d’historiens et de romanciers qui s’essaye à ne voir là qu’une exécution capitale parmi tant d’autres. Ils n’ignoraient pas pourtant que suivant le livre des Rois, référence de la doctrine monarchique de droit divin, « le sacre (de droit divin) est le lien qui unit le Roi à Dieu, et le canal par lequel la puissance, l’assistance et le rayonnement de la majesté divine se communiquent au Roi au moment où il devient l’oint du Seigneur "personne sainte et sacrée" »

Redonner mensongèrement un caractère profane à la royauté était et reste le subterfuge indiqué pour rallier à soi les bonnes âmes sur le sort tragique de celui qui est ainsi redevenu, par la magie d’une omission, un simple individu. Tous ces trémolos de circonstances étaient nécessaires pour permettre à la bourgeoisie affairiste de relever les totems, les tabous, qui sont nécessaires à son impunité et pour parvenir ensuite à sa confortable position de juge et partie pour des actes dont elle est responsable. En réalité dans cette personne du Roi, la pression populaire qui s’exerçait jusqu’au sein de la Convention [3] voulait abattre non un être humain mais la plus sacrée des institutions [4]. Dès lors, la signification de la mise à mort du roi était que le Peuple déniait à ses bourreaux le droit de lui faire la morale, aussi divine soit elle.

Gracchus

[1] G. Soboul, donne ainsi pour la seule ville de Paris, le chiffre de 62 743 salariés (soit, en comptant les familles, 300 000 personnes, le tiers de la population de la ville en 1789), auxquels il faut ajouter 70 000 « indigents ».

[2] Bien entendu, il y a de notables exceptions, en particulier l’ouvrage de Pierre Kropotkine, « La Grande Révolution », qui remet les pendules à l’heure en portant l’accent sur l’action populaire.

[3] On retrouve dans le compte-rendu des actes de la Convention, paru au « Moniteur », la trace de cette pression qui s’exerçait au jour le jour sur les Conventionnels, c’était l’époque où le mot « citoyen » signifiait quelque chose... Becker un député « modéré » de la Moselle y évoque ainsi « les menaces qui ont retenti dans les tribunes » à son encontre le 16 janvier 1793

[4] « Les peuples habitués à considérer les rois comme objets sacrés se diront que ces têtes ne sont pas si sacrées, puisque la hache en approche et que les bras vengeurs de la justice vont la frapper. Et c’est ainsi que vous les poussez alors dans la carrière de la liberté. », J. Boilleau député de l’Yonne, 16 janvier 1793, toujours dans le "Moniteur".

Nota : le procès de l’ex roi Louis XVI eut lieu non devant un tribunal mais à la Convention qui était l’assemblée de députés de l’époque. Il a débuté le 10 janvier 1793 par la lecture de l’acte d’accusation et l’interrogatoire de Louis Capet (véritable nom de Louis XVI). Trois appels nominaux ont précédé le verdict énoncé le 17 janvier 1793, au terme duquel Louis a été reconnu coupable et condamné à la peine de mort. Le 18 janvier et jusqu’au 19 janvier à 15 heures, un quatrième appel nominal a rejeté le sursis et a décrété la mort dans les 24 heures. L’exécution eut lieu place de la Révolution (actuelle place de la Concorde) à Paris le 21 janvier 1793.



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Re: Collation pour une décollation

Messagede goldfax le Mer 26 Jan 2011 17:08

« Je ne connais point l’humanité qui égorge les peuples et qui pardonne aux despotes » Maximilien Robespierre, Convention, séance du 16 janvier 1793


J'aime beaucoup son sens de l'humour à celui-là... :confus:
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