Pierre Morain

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Pierre Morain

Messagede pit le Dim 2 Juin 2013 02:50

Pierre Morain est décédé

C’est un militant infatigable qui vient de nous quitter, à l’âge de 83 ans. Ouvrier du bâtiment, militant de la Fédération communiste libertaire en 1955, Pierre Morain s’est distingué dans le combat anticolonialiste, de la guerre d’Algérie à la cause palestinienne ces dernières années.

A son enterrement, le 30 mai à Saint-Martin-du-Larzac (Aveyron), environ 200 personnes étaient venues de tout le plateau et de plus loin. Des militants de tous les horizons — Alternative libertaire, Confédération paysanne, Faucheurs volontaires d’OGM, Ecole émancipée, Campagne civile pour la protection du peuple palestinien — étaient présents et ont lu des allocutions souvent émouvantes. Citons notamment celles d’un ancien prisonnier palestinien, et le message transmis par Jean-Claude Amara (Droits devant !!) et par Jean-Baptiste Eyrault (DAL).

Notre camarade Daniel (AL Paris-Sud) a transmis un message de Line Caminade (ex-FCL) et raconté sa rencontre avec Pierre et sa compagne Suzanne, lorsqu’il a réalisé le film Une résistance oubliée, dont des extraits ont été projetés pendant la cérémonie.

Après quelques chansons antimilitaristes comme La Butte rouge et Le Déserteur, les présents ont fait à Pierre l’hommage d’une ultime Internationale tandis que le cercueil était porté en terre.

Nous assurons sa compagne Suzanne et sa fille Eliane de toute notre amitié. Nous parlerons plus longuement de Pierre Morain dans le numéro d’été d’Alternative libertaire.

http://www.alternativelibertaire.org/sp ... rticle5360


Mort de Pierre Morain, incarcéré à Loos en 1955 pour son soutien aux révolutionnaires algériens

« Moi je ne suis pas français, je suis ouvrier ». Voilà ce que répondit Pierre Morain au tribunal de Lille qui lui demandait pourquoi lui, Français, participait aux côtés des travailleurs algériens aux violentes émeutes qui retournèrent le centre-ville de Lille ce 1er mai 1955. Pierre Morain, ouvrier du bâtiment installé à Roubaix, anarchiste, sera le premier métropolitain incarcéré pour son soutien aux révolutionnaires algériens. Il est décédé le 27 mai 2013. L’historien Jean-René Genty lui rend cet hommage.

Image

Pierre Morain, à la sortie de la prison de la Santé en mars 1956
(source : tract annonçant la sortie de la brochure « Un homme, une cause… »)


Mort d’un anarchiste !

Pierre Morain est mort le 27 mai 2013 au Larzac où il résidait avec son épouse Suzanne depuis les années soixante-dix. Tous deux participaient à la lutte des agriculteurs du plateau contre l’extension du camp militaire. Au moment de son installation sur le plateau, Pierre Morain comptabilisait alors déjà de nombreuses années de militantisme. Jeune ouvrier du bâtiment dans la région parisienne au début des années cinquante, il militait à la Fédération Communiste Libertaire (FCL) et appartenait à son cercle le plus restreint, « l’Organisation Pensée Bataille » emmenée par Georges Fontenis.

C’est à ce titre qu’il fut envoyé dans le Nord en avril 1955 à la demande du Mouvement National Algérien avec mission d’organiser un comité de soutien aux militants algériens. Les contacts entre Messali Hadj et la FCL étaient alors étroits via l’intermédiaire de Daniel Guérin, qui se réclamait à la fois du communisme libertaire et de la lutte anticolonialiste. Pierre Morain expliquait que, se retrouvant à Roubaix, il n’avait pas eu vraiment le temps de trouver des contacts dans les milieux métropolitains. En revanche, il fut rapidement adopté par les Algériens de Roubaix, travaillant le jour comme manœuvre terrassier chez Carette-Duburcq et diffusant le soir et le week-end Le Libertaire dans les cafés algériens. Le journal consacrait une large place à l’activité des révolutionnaires algériens et Pierre Morain rédigea plusieurs articles importants consacrés à la vie quotidienne des Algériens de Roubaix.

Il fut partie prenante des événements du 1er mai 1955 à Lille au cours desquels les Algériens du Nord encadrés par le service d’ordre messaliste affrontèrent pendant cinq heures les charges des forces de police et de gendarmerie mobile qui tentaient de s’emparer des banderoles proclamant l’Algérie libre et des portraits du Zaïm. Pierre Morain participa aux affrontements aux côtés de ses camarades algériens. Repéré par les différents services – il signait de son nom les articles publiés dans Le Libertaire – il fut contrôlé par des douaniers (la bataille de la frontière entre nationalistes algériens et forces de l’ordre commençait) le 23 mai. Le 24 mai, il fut interpellé par la DST puis relâché. Le 29 mai, Pierre Morain fut arrêté et emprisonné à Loos où il rejoignit les cadres algériens incarcérés à la suite de la manifestation. Tous étaient poursuivis pour « reconstitution de ligue dissoute ». Pierre Morain fut condamné à cinq mois de prison. Après appel interjeté par le parquet, la Cour d’appel de Douai élevait sa peine à un an de prison.

La condamnation du premier « Frère des Frères » de la guerre d’indépendance algérienne en métropole passa assez inaperçue et le cas Morain sortit peu à peu de l’anonymat grâce à l’action du comité de défense emmené par Jean Cassou, Daniel Guérin, Claude Bourdet et Yves Dechezelles. Mais ce fut la prise de position d’Albert Camus dans L’Express du 8 novembre 1955 qui attira l’attention de l’opinion publique sur « la situation d’un jeune militant (…) placé sous les verrous pour avoir manifesté un mauvais esprit en matière de politique algérienne. La protestation, jusqu’à présent a été limitée à d’étroits secteurs de l’opinion. Morain ayant le double tort d’être ouvrier et anarchiste ». Rappelons que jusqu’à sa mort, Camus demeura fidèle à ses contacts avec l’anarchisme et le messalisme.

Pierre Morain quitta la prison de la Santé à la fin du mois de mars 1956 mais il demeurait sous le coup d’une inculpation pour atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat. En janvier 1957, il participait à l’assaut donné par un groupe de « l’Organisation Pensée Bataille » contre la permanence du mouvement Poujade, rue Blomet dans le 16ème arrondissement.

L’aventure du groupe « Organisation Pensée Bataille » se termina par le passage dans la clandestinité et l’arrestation de son principal dirigeant, Georges Fontenis.

Par la suite, Pierre Morain continuera à militer dans la mouvance anarchiste puis alternative.

J.-R. GENTY

Sources : Fontenis Georges, L’autre communisme, histoire subversive du mouvement libertaire, Lucée, Acratie, 1990 ; Comité Pierre Morain, Un homme, une cause, Pierre Morain prisonnier d’Etat, Paris, 1956 ; Témoignage de Pierre Morain, 22 août 1992, archives privées J.-R. Genty ; Témoignage de Georges Fontenis, 23 juin 1992, archives privées J.-R. GENTY ; Collection du journal Le Libertaire, BDIC de Nanterre. Genty J.-R., L’immigration algérienne dans le Nord-pas-de-Calais, Paris, L’Harmattan, 1999 ; Genty J.-R., Fidaou el Dzezaïr, les nationalistes algériens dans le Nord, Paris, L’Harmattan, 2008.

http://labrique.net/numeros/en-ligne-un ... ncarcere-a


Algérie, Toussaint 1954 : Le déclenchement de l’insurrection

Il y a 50 ans éclatait l’insurrection algérienne, prélude de la guerre de libération nationale qui aboutit en 1962 à la décolonisation de l’Algérie.

Plus d’un siècle et demi avant, en 1794, la Révolution française est menacée de l’intérieur et sur ses frontières. Les réserves s’épuisent et aucun État ne veut vendre de grain à la France hormis le dey d’Alger. Deux ans plus tard, les finances de la France sont au plus bas et de nouveau, le dey va prêter au Directoire, un million sans intérêts pour l’achat de blé. Par le biais d’intermédiaires, la France achète alors pour 7 millions de blé. 31 ans plus tard le dey n’a toujours pas récupéré le premier million.

Plus grave encore, le dey apprend que la France vient de fortifier un bâtiment destiné au commerce sur la côte algérienne. Il demande des explications au gouvernement ; ses lettres restent sans réponse. Il convoque le Consul de France. Le ton monte, le dey donne un coup de chasse-mouche au consul… La France tient son prétexte. Nous sommes en 1830, la première guerre d’Algérie commence et durera 40 années durant lesquelles des villages seront incendiés, des tribus entières asphyxiées dans des grottes, des hommes et des enfants massacrés, les femmes parfois épargnées pour être vendues. Le bétail et les terres seront récupérés par l’armée pour être redistribuées aux colons.

Le point de non-retour

Pendant près d’un siècle le peuple algérien subit mais ne se résigne pas. Longtemps il a espéré une intégration, ou du moins l’égalité. Les anciens combattants de la Grande guerre n’ont toujours pas les mêmes droits que leurs frères de tranchée de métropole ni la même reconnaissance. Quand il faut se battre pour délivrer la « mère-patrie » du joug nazi, ils sont encore là sur les côtes italiennes, au Monte Cassino et au delà de la frontière du Rhin. Ceux qui en réchappent, encore tout auréolés de gloire, vont apprendre en rentrant au pays ce qui s’est passé à Sétif le jour de la victoire du 8 mai 1945 1. Les médailles se ternissent et les poings se serrent. Parmi ces soldats, il y a l’adjudant Ben Bella, le sergent Ouamrane, l’adjudant Boudiaf et bien d’autres qui, petit à petit, se font à l’idée que seule une lutte armée, émancipera le peuple algérien.

La colère couve

Depuis le massacre de Sétif, les choses s’emblaient rentrer dans l’ordre. La France se relève de la guerre. L’Algérie traditionnelle et rurale fournit des milliers de travailleurs pour l’industrie métropolitaine. Ce prolétariat de plus en plus important est organisé dans les syndicats mais surtout politisé autour de Messali Hadj, chef charismatique d’un mouvement ouvrier et indépendantiste depuis le milieu des années 20 2. À l’aube de l’insurrection, le vieux dirigeant va laisser passer sa chance historique. Il ne prendra pas au sérieux les informations concernant la date et la mesure du projet. Il est vrai qu’ils ne sont, fin juillet 1954, que 22 jeunes activistes regroupés au sein du CRUA 3 à prendre la décision de déclencher une action nationale pour le courant de l’automne et à proclamer le Front de libération nationale.

L’étincelle

Après avoir été repoussée une fois, la date du déclenchement est décidée pour le jour de la Toussaint. À minuit dans cinq zones de l’Algérie, des fermes sont incendiées, des casernes attaquées, des colons tués. Des attentats visent des centres énergétiques et industriels. L’ensemble de la communauté des Français d’Algérie est frappé de stupeur par la multiplication coordonnée des attaques. Le gouvernement, l’armée, les colons, les fonctionnaires, le petit peuple, tout ce système colonial ne peut imaginer que la deuxième guerre d’Algérie vient de commencer. Elle durera huit ans au cours desquelles la France écrira ses pages d’histoire parmi les plus sombres.

Les communistes libertaires

La Fédération communiste libertaire (FCL) créée en 1953 va soutenir activement les luttes anti-colonialistes au côté des indépendantistes de tout l’empire. Chaque numéro du Libertaire foisonne d’articles dénonçant les méfaits de la France en Indochine et appelle au sabotage et à la désertion. Les lecteurs sont régulièrement informés de l’évolution de la situation au Maroc et en Tunisie. Depuis 1951 le Mouvement libertaire nord-africain (MLNA) tente d’organiser les travailleurs sur place et est une source d’information importante permettant plus tard à la FCL d’être parmi les tous premiers à dénoncer la torture. Tout naturellement lorsque les militants de la FCL apprennent le déclenchement de l’insurrection, ils se mobilisent immédiatement. Les saisies, amendes, procès vont bientôt faire partie du quotidien. Un de ses militants, Pierre Morain, sera le premier prisonnier politique européen de la guerre d’Algérie.

René Jacques Defois


Références bibliographiques :
- Robert Louzon, Cent ans de capitalisme en Algérie, 1830-1930, Acratie.
- Georges Fontenis, Changer le monde, histoire du mouvement communiste libertaire 1945-1997, Le Coquelicot/Alternative libertaire.
- Daniel Guérin, Quand l’Algérie s’insurgeait, 1954-1962, La Pensée sauvage.

http://www.alternativelibertaire.org/sp ... rticle1240
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Re: Pierre Morain

Messagede fabou le Mer 5 Juin 2013 22:40

Je l'avais posté sur le far mais je le remet ici :

Je connais Pierre et Suzanne depuis 2006, on s'était connus aux faucheurs volontaires. La perte de notre local associatif "Construire Un Monde Solidaire" (dissout par la clique à Bové), en 2009, les a beaucoup affectés. Cette dernière année, Pierre était vraiment malade et Suzanne ne pouvait plus vivre seule dans leur hameau des Mares sur le Larzac. Celà faisait quelques mois qu'il étaient tout deux en maison médicalisée.

Ils ont perdu leur fils il y a pas longtemps, et maintenant c'est Pierre qui s'en va. Autant vous dire que je suis très ému.
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Interview d'une militante de la FA, au sujet de vroum : " il me glace carrément le sang "
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Re: Pierre Morain

Messagede pit le Lun 1 Juil 2013 01:34

articles de Pierre Morain dans Le Libertaire (1917-1956)
http://www.lelibertaire.net/catalogue/a ... auteur=360


vidéo.
Reportage réalisé à l'occasion de la sortie du DVD des 10 ans le la CCIPPP, juin 2011.




Le militantisme sans faille de Suzanne et Pierre Morain, 73 ans chacun

LE MONDE | 07.08.03 | 13h08

"Ils sont où les Morain ?" Vingt fois par jour, l'interpellation résonne. Et, à chaque fois, c'est tout le plateau du Larzac qui s'inquiète pour son couple de vieux militants. Inséparables, donnant le coup de main encore et toujours aux "copains". Sans jamais transiger.

A 73 ans chacun, Suzanne et Pierre Morain restent soudés dans la même rigueur militante. Le 14 juillet, malgré la fatigue et la chaleur, ils montaient en car de Millau (Aveyron) pour des opérations coups-de-poing en faveur de la libération de José Bové. Depuis, membres du collectif Construire un monde solidaire, qui organise le rassemblement du plateau du Larzac des 8, 9 et 10 août, ils sont de tous les préparatifs.

Suzanne n'entend plus très bien. Et Pierre n'a jamais été un causeur. Lui, accent titi parisien, un peu ours, était dans le bâtiment. "Maçon" ou "manœuvre", selon le patron qui acceptait de prendre ce syndiqué CGT peu commode, et en général assez vite viré pour son activisme. Suzanne, elle, était institutrice. Le plateau les a accueillis en 1976. Après une histoire déjà longue en batailles.

A 25 ans, jeune communiste libertaire, Pierre a été un des premiers militants français à faire de la prison pour son soutien aux indépendantistes algériens. Après une distribution de tracts appelant au sabotage du matériel de guerre et un 1er Mai à Roubaix (Nord) où il fait le coup de poing avec la police qui impose au cortège syndical de sortir les Algériens de ses rangs, il purge "un an de taule" à Loos pour "atteinte à la sûreté de l'Etat". On est en 1955. Deux ans plus tard, direction la Santé, à la suite d'un plasticage des locaux du mouvement poujadiste à Paris.

"Suzanne et moi, on participait à toutes les bagarres contre l'extension du camp militaire du Larzac. Alors, les gens nous ont dit : pourquoi vous vous installez pas ici ?", raconte-t-il. Pour occuper le terrain face aux militaires, ils s'installent au cœur de la zone expropriée, dans une ferme abandonnée au lieu-dit Les Mares. Vingt- sept ans après, ils y habitent toujours.

Entre-temps, il y aura eu le soutien aux Kanaks mais aussi aux Polynésiens contre les essais nucléaires, aux Japonais qui protestaient contre l'extension d'un aérodrome militaire, aux villages sandinistes, au début de la révolution nicaraguayenne. Sans oublier les mobilisations de la Confédération paysanne.

"Tout cela, c'est beaucoup de travail, mais c'est ce qu'on appelle le retour de solidarité. Tous ces gens qui étaient venus d'ailleurs pour nous aider sur la bataille du Larzac, fallait qu'on les aide à notre tour", soulignent les Morain. Et quand on leur demande si, à leur âge, ils n'auraient pas un peu envie de souffler, Pierre grogne : "On n'a pas à subir la société qu'on nous impose. Et puis, combattre isolément, on s'en sort pas."

Caroline Monnot

[Source : http://www.lemonde.fr/article/0,5987,32 ... 3-,00.html]

http://nantes.indymedia.org/article/1038



Alter Echo 30 mai (Hommage à Pierre Morain)
émission sur Radio Larzac

Notre ami, compagnon de lutte et voisin, Pierre Morain est décédé lundi 27 mai 2013.

Pierre était le défenseur de tous les "sans", sans-papiers, sans logement, Palestiniens, Faucheurs volontaires... Il était de toutes les luttes avec sa femme Suzanne.
Sa femme qu'il a rencontrée car, emprisoné pendant la guerre d'Algérie, elle lui a écrit en prison pour le soutenir. la guerre d'Algérie, il s'est battu contre à une époque où cet engagement était loin d'être unanime. Pierre faisait partie de ceux qui savent dire "non" au bon moment. De ceux qui font avancer les idéaux de justice et de fraternité. Il était venu en parler à la radio en mars 2009 avec Michel Lefeuvre qui a lutté aussi à sa façon contre cette guerre violente et coloniale.

Salut camarade et toutes nos amitiés à ta femme, Suzanne !

à écouter
(59m 12s - 84.8 Mo - 200 kbps , pour télécharger, utiliser le bouton droit de la souris et faites "Enregistrer la cible du lien sous") :
http://www.radiolarzac.org/telecharger/ ... morain.mp3

http://forum.anarchiste-revolutionnaire ... 94#p102801
.
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Re: Pierre Morain

Messagede Zoom le Sam 17 Aoû 2013 11:51

Dans le dictionnaire des militants anarchistes
MORAIN, Pierre

Au début des années 1950, ouvrier du bâtiment et membre du Syndicat Unique du bâtiment (SUB) de la CNTF, Pierre Morain collaborait au Combat Syndicaliste et le 29 novembre 1953, lors du congrès régional de la 2è Union régionale (Paris) de la CNTF avait été élu à la commission administrative. Il avait également adhéré à la Fédération anarchiste où il était membre du groupe clandestin Organisation Pensée Bataille (OPB) constitué autour de G. Fontenis pour contrôler l’organisation qui devint alors la Fédération communiste libertaire (FCL).

En accord avec le Mouvement National Algérien (MNA) de Messali Hadj, il fut envoyé au printemps 1953 dans le Nord pour y organiser l’agitation anticolonolialiste et la solidarité avec les militants algériens. Il fut l’auteur à cette époque de plusieurs articles parus dans Le Libertaire sur les conditions de vie des travailleurs algériens à Roubaix. Le 1er mai 1955 il participait à Lille aux violents affrontements survenus lors de la manifestation entre les forces de l’ordre et les travailleurs algériens porteurs de banderoles réclamant L’Algérie libre . Arrêté le 29 mai, il fut emprisonné à Loos et poursuivi avec plusieurs responsables du MNA pour « reconstitution de ligue dissoute ». Lors du procès tenu à Lille en août, lorsque le Président lui avait demandé pourquoi en tant que Français il avait manifesté avec les travailleurs algériens, il avait répondu « Non je ne suis pas français, je suis ouvrier ». Condamné avec trois militants algériens à 5 mois de prison, la peine fut portée en septembre à un an à la suite d’un appel du parquet et il fut écroué à la prison de Loos. Il fut le premier français métropolitain emprisonné pour soutien aux révolutionnaires algériens.

Pris en charge par un comité de défense parrainé notamment par Daniel Guérin, Yves Dechezelles, Claude Bourdet, Jean Cassou et avec le soutien d’Albert Camus, Pierre Morain qui avait été interné à la prison de la Santé, fut remis en liberté fin mars 1956 mais resta sous l’inculpation « d’atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat » suite à un article anti-colonialiste paru avant son incarcération dans Le Libertaire. En février précédent était paru la brochure Un homme, une cause, Pierre Morain prisonnier d’Etat » éditée par le comité de défense.

A sa sortie de prison il rencontra la militante FCL Suzanne Gouillardon avec laquelle il devait se marier en 1957.

En janvier 1957 il participa à l’attaque par un groupe de la FCL du local du mouvement poujadiste rue Blomet dans le 15eme arrondissement de Paris ce qui lui valut d’être arrêté avec plusieurs autres militants de la FCL dont André Nedelec, Jean Le Gars, Paulette Pertois, Gabrielle Bernard et Manuel Rodriguez et d’être condamné avec Le Gars à une très forte amende qui sera couverte par une souscription spéciale et d’être incarcéré à la Santé puis à Poissy jusqu’au printemps 1958.

A sa libération et après la disparition de la FCL suite notamment à la répression, P. Morain s’intalla avec sa compagne dans la Nièvre où il allait militer au syndicat CGT du bâtiment de Nevers et adhérer au Parti communiste dont il fut par la suite exclu à la fin des années 1960 pour « orientation pro-chinoise ». Début mai 1968 il fut avec Georges Fontenis l’auteur d’un appel aux anciens de la FCL et aux militants de lUnion des groupes anarchistes communistes (’UGAC). Lié un temps à la Gauche Prolétarienne, il constitua au début des années 1970 le groupe autonome ouvriers paysans de la Nièvre et en 1974 participa à la tentative de regroupement Pour qu’une force s’assemble (PQFS) initialisée par l’Organisation Révolutionnaire Anarchiste (ORA) pour fédérer divers groupes intervenant dans les entreprises et les quartiers. PQFS avait été constitué lors d’une réunion tenue les 4-5 janvier 1974 à Paris et réunissant essentiellement des militants de l’ORA ( groupes du Rail enchaîné, du Postier Affranchi, du Canard du 13ème, militants d’Air-France, Usinor-Dunkerque, etc…) et un bulletin de Contribution au débat fut édité (5 numéros) ; puis le regroupement élargi à des groupes non-léninistes dont le groupe de la Nièvre, devint Pour un mouvement révolutionnaire des travailleurs (PMRT) qui disparaîtra en 1975 après avoir publié au moins 5 numéros d’un bulletin de même nom.

Puis vers 1976 il s’était installé avec sa compagne Suzanne sur le plateau du Larzac où tous deux participèrent aux luttes contre l’extension du camp militaire. Il s’impliqua par la suite dans la solidarité avec les Kanaks, la révolution nicaraguayenne le soutien aux Palestiniens et la lutte contre les OGM.

Pierre Morain est décédé le 27 mai 2013 et a été enterré le 30 à Saint Martin du Larzac (Aveyron) en présence de nombreux militants (Alternative Libertaire, Confédération paysanne, Faucheurs volontaires, Campagne civile pour la protection du peuple palestinien, etc).



Sources : G. Fontenis « L’autre communisme… », op. cit.// Alternative Libertaire, juin et été 2013 (nécro. De G. Davranche)// G. Lenormant & D. Goude « Une résistance oubliée : des libertaires dans la guerre d’Algérie (1954-1957) » (DVD, 2001)// « L’insurrection algérienne et les communistes libertaires » (Ed. Alternative libertaire)// Notes D. Dupuy//

http://militants-anarchistes.info/spip.php?article9565
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Re: Pierre Morain

Messagede Zoom le Sam 21 Sep 2013 14:57

(...) Ses obsèques ont été suivies par près de 200 personnes venues de tout le Larzac et de plus loin. Des militantes et des militants d’horizons variés – Alternative libertaire, Confédération paysanne, Faucheurs d’OGM, École émancipée, Campagne civile pour la protection du peuple palestinien – étaient présents et ont lu des allocutions souvent émouvantes. Citons notamment celles d’un ancien prisonnier palestinien, et le message transmis par Jean-Claude Amara (Droits devant !!) et par Jean-Baptiste Eyrault (Dal). Notre camarade Daniel (AL Paris-Sud) a transmis un message de Line Caminade (ex-FCL) et a raconté sa rencontre avec le couple Morain en 2000, pour le film Une résistance oubliée , sur le combat libertaire contre la guerre d’Algérie.

Après quelques chansons antimilitaristes comme La Butte rouge et Le Déserteur, les présents ont fait à Pierre l’hommage d’une ultime Internationale tandis que le cercueil était porté en terre. Nous assurons sa compagne Suzanne et sa fille Éliane de toute notre amitié.

Guillaume Davranche (AL Montreuil)

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