pit a écrit:Je pense que tu te fais un film. Pour reprendre les exemples que tu donnes, comme celui de vitrines explosées, je ne vois pas bien en quoi cela ébranle le capitalisme, et le discours sur la tension ne passe que pour du bla-bla. Je pense que cette question de "tension" pourrait aussi être pensée comme construction d'un réel rapport de force, et là c'est moins du bla-bla parce que ça se mesure.
Pour l'exemple, je n'ai fait que citer une intervention précédente, et cette intervention montrait d'ailleurs très bien comment sont vus les insurrectionnalistes par une bonne partie du reste des anarchistes (enfin surtout ceux qui ont pris leur carte de membre dans une organisation formelle(ment hiérarchisée)). Et effectivement, ce genre d'action n'a jamais eu pour but d'ébranler le capitalisme, c'est un peu ce que j'ai tenté d'expliquer dans mon message précédent (donc j'ai pas dû être assez clair). Il s'agit plus d’étincelles qui en appellent d'autres. Bref je vais pas répéter ce que j'ai dit précédemment...
Je veux bien des arguments concernant le fait que tu penses que "le discours sur la tension ne passe que pour du bla-bla"
Je veux bien aussi que tu entends par "construction d'un réel rapport de force" et la manière dont ça se mesure. J'ai souvent vu cette expression utilisée par les syndicats réformistes, donc ça m'inquiète un peu au premier coup d’œil quand je la vois utilisée par un anarchiste
pit a écrit:Quant à faire tourner une manif en émeute, il y a des contextes dans lesquels il n'y a pas besoin de ce type de minorité agissante en avant-garde
Peux-tu me donner des exemples dans lesquels une manif n'a pas besoin de tourner en émeute pour avoir une efficacité quelconque ? On est d'accord qu'on est toujours dans le domaine révolutionnaire, hein, pas réformiste.
En quoi s'agirait-il d'une avant-garde, ou du moins, en quoi serait-ce une mauvaise chose ? Il faudrait que n'importe quelle action un tant soit peu subversive soit décidée à la majorité absolue en AG avant d'être mise en œuvre ? Que fait-on de la spontanéité dans ce cas ? Si on part dans cette direction, utiliser un slogan qui n'a pas été prévu par les organisateurs de la manif peut-il être vu comme de l'avant-gardisme ?
Et en quoi des actions violentes pendant une manif serait-elles plus de l'avant-gardisme vis-à-vis du reste des manifestants qu'une manifestation ne le serait vis-à-vis des gens ne se trouvant pas dans la manif ?
Je pense qu'il serait bon d'éclaircir cette histoire d'avant-garde
pit a écrit:et en tout cas il ne semble pas que ce type de stratègie soit performante de ce point de vue en ce moment dans notre coin, car cela se verrait, et en tout cas il est clair que dans les manifs les quelques zozos qui jouent à l'insurrection et la mettent en scène, ne pèsent pas de beaucoup pour changer un cours des choses et un contexte où la classe dominante fait actuellement son beurre dans la toute puissance.
Il est vrai qu'en terme de stratégie, les "manifs à slogan" avec Marcel qui retrouve les copains de la CGT Rhône-Alpes Métallurgie avec son drapeau dans une main et son sandwich à la merguez dans l'autre sont beaucoup plus payantes (tu peux remplacer le G par un N, ça revient au même)
pit a écrit:Encore que dans un domaine plutôt radical de fait, l'accroc à la chemise à Air France, et un accroc à la paix sociale et au bon "dialogue social", et malgré l'effort des politicards et des médias pour faire partager la condamnation de ce type de violence, fait plutôt marrer pas mal de monde, et devient tout un symbole, et c'est pas des "insurrectionnalistes" de théâtre qui se sont fachés.
Bah nan, c'est des gens qui pensent que le travail est une finalité. Sinon ils ne seraient pas à la CGT (tu peux remplacer le... ahahah). Cet exemple me paraît un peu hors sujet vu que la lutte des salariés d'Air France n'a rien de révolutionnaire. Elle ne vise en rien à modifier radicalement quoi que ce soit mais juste à empêcher que leur propre situation personnelle ne se dégrade. Pour rappel, les matons ont aussi leur section CGT. Mais t'as le droit d'être émerveillé par ce que tu veux, y'en a bien qui sont émerveillés par les bonnets rouges...
pit a écrit:On pourrait aborder la question de l'autodéfense sur la ZAD qui relève d'encore autre chose rapporté au sujet, mais qui sur un autre terrain de résistance, on peut dire violente, en articulation avec un réel mouvement, arrive à contrecarrer cette toute puissance.
Tiens c'est marrant que tu parles de ça, puisque la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes s'est récemment fendue d'un communiqué pour se déclarer commune autonome (référence à la fin de ton message)
pit a écrit:Mais en même temps je ne trouve rien dans ce que tu énonces sur d'autre domaines de luttes et d'interventions que celle de la mise en scène en manif, et sur la nécessaire construction de forces collectives, à même, elles, de peser réellement sur le cours des choses.
Donc je t'invite à relire mon message puisque je n'évoque la manif/l'émeute que sur deux points.
Maintenant, je trouve douteux que quelqu'un ayant des vues révolutionnaires (à moins que tu ne fasses partie de ces mystérieux anarchistes non-révolutionnaires dont je n'ai entendu parler que via l'utilisation de l'expression "anarchiste révolutionnaire", auquel cas du pourrais par la même occasion m'en apprendre d'avantage sur ce point) parle de "domaines de luttes". On est sur un forum anarchiste mais on fait une distinction entre les différents "domaines de luttes" ? Donc on ne parle pas d'homophobie et de racisme dans les squats (désolé, les squats c'est peut-être trop sale pour la CNT et la Fédération Anarchiste) ? Il faut absolument tout cloisonner et surtout ne jamais parler des luttes dans leur aspect général ?
pit a écrit:Et de mon point de vue la question du choix de société, et du projet de société, devient importante pour la construction d'une dynamique révolutionnaire. Il ne s'agit évidemment pas de construire pour appliquer une recette de cuisine toute faite, mais de construire des jalons, et pas des idées perchées et bien vagues, mais un cadre repère adaptable à différentes situations et contextes pour pouvoir harmoniser au maximum ce qui doit être réfléchi aussi à l'échelle monde et pas qu'à l'échelle bled. En tout cas un peu plus d'éléments que le fait de s'en moquer et avancer simplement la possibilité de fédération de communes autonomes (de tribus ?).
Ah donc j'en déduis que t'as lu L'insurrection qui vient ? Désolé, à la base je ne voulais pas spoiler mais je vois que j'ai affaire à un fervent lecteur de ce bouquin.
Si j'ai évoqué cet aspect du bouquin sans plus développer, c'était juste pour répondre à un point d'argumentation qui avait été avancé (qui disait en gros que les insurrectionnalistes voulaient tout péter et que la réflexion sur le futur s'arrêtait là). Pour ceux qui veulent développer la question, le livre n'est pas très long à lire et dispo gratuitement en PDF. Et pour ceux qui se posent la question, je ne voue pas un culte au Comité Invisible, c'était juste un exemple. Pour ceux qui seraient un minimum courageux, il pourront trouver d'autres exemples d'insurrectionnalistes ayant couché par écrit leurs réflexions sur l'avenir d'un monde où le service d'ordre de la CNT (tu peux remplacer le N par un G mais ça sera moins drôle) se sera fait dépasser par des gens qui veulent changer radicalement les choses. Et ils verront que ce n'est pas forcément les mêmes idées que celles du Comité Invisible, et ils comprendront alors l'impossibilité de poser un réel "projet de société" sans se comporter en autoritaire.
pit a écrit:La question de la violence n'est pas vraiment posée entre violents et non-violents.
Et ça fait peut-être partie des causes d'un problème
pit a écrit:Toute la question repose sur les objectifs et la finalité, et c'est là qu'il y a divergences.
Oui je comprends ce que tu veux dire. Si tous les révoltés (anarchistes) se donnaient les moyens de passer radicalement à l'action par la violence, il se pourrait bien qu'on gagne trop rapidement. Tellement rapidement qu'on n'aurait pas le temps de réfléchir correctement à un bon petit projet de société. Alors qu'en se contentant de gueuler des slogans et en prenant bien soin de déclarer le parcours des manifs en préfecture, là on a largement le temps de s'organiser.
pit a écrit:La révolution espagnole débute par la prise des armes et l'affrontement armé, mais en s'appuyant sur un mouvement de masse qui avait pris pas mal d'années à construire dans la lutte des classes et en construction de force collective (la CNT et la FAI), et en tout cas un affrontement bien réel celui-là.
Qui s'est terminé, rappelons-le, par l'intégration des milices confédérales dans l'armée républicaine avec l'aval de la CNT
pit a écrit:Tu pourras bien continuer à te plaire à faire le mariole sur forum, comme peut-être en manif, et les encapuchonnés comme les clowns super à la mode en ce moment sont deux faces d'un carnaval qui me gonfle,
Moi c'est les drapeaux de pub pour les différentes organisations qui me gonflent, chacun son truc
pit a écrit:mais construire les éléments de la révolution sociale demande de se mouiller un peu plus, dans l'agir, dans différents domaines d'intervention, et dans le nécessaire domaine de la réflexion.
Oui pardon, j'ai tendance à oublier que l'insurrectionnaliste ne fait QUE casser des vitrines (et toujours en manif)