Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mer 9 Mar 2011 11:23

Démasquer les méthodes du collectif de Tarnac
LEMONDE.FR | 07.03.11 | 09h45
Philippe Cibois, professeur émérite de sociologie de l'université de Versailles-St-Quentin en Yvelines

Les "mis en examen dans l'affaire dite de Tarnac" viennent de préciser leur attitude dans Le Monde du 25 février : il faut les critiquer mais aussi leur répondre. Les critiquer d'abord : il n'est pas possible d'identifier la France avec la Tunisie de Ben Ali sous prétexte de persécutions policières. En effet, si la police les pourchasse, c'est, disent-ils, pour des "motifs dérisoires" comme s'attaquer à des distributeurs automatiques, des voitures, ou poser "quelques innocents crochets" sur des caténaires. L'aveuglement est ici total car si ces violences ne portent pas atteinte aux personnes, elles relèvent du mécanisme qui est celui de toute insurrection dont la légitimité est à peser avec soin.

La rébellion peut être un devoir moral, on l'affirme depuis Sophocle dans le cas d'Antigone et la Résistance l'a rappelé, mais il faut que les actions utilisées soient adaptées au but recherché pour qu'elles deviennent légitimes. Ce n'est pas le cas : on ne lutte pas contre la crise en "bloquant les flux", périphrase employée pour bloquer les TGV. De plus, les "tarnaciens" retrouvent des réflexes classiques : comme on n'arrive pas à faire la révolution, on se rabat sur des objectifs plus limités et, comme ceux-ci sont l'objet de poursuites pénales, se produit alors le cercle de la répression protestation qui devient la justification idéale. Comme la réalité de la répression ne peut être mise en doute, elle légitime d'une manière rétroactive ce qui a été fait auparavant.

Dans une démocratie comme la France, c'est l'action non-violente qui doit être utilisée car son efficacité est liée au fait que l'on doit arriver à convaincre. Une manifestation, une grève, un boycott, une pétition supposent autrement d'énergie qu'un sabotage ponctuel : il faut argumenter, expliquer et ne pas rester dans les certitudes du cercle restreint de ses camarades. Penser que l'on a raison contre l'apathie des masses et que l'on est la conscience qui réveillera les intelligences ne devrait plus être pensable après ce qui a été vécu au siècle précédent. Comme c'est le cas des tarnaciens, il faut leur répondre, mais pas à la manière du pouvoir en place.

J'emprunterai ma réponse à Eugenio Scalfari, le créateur et ancien directeur du quotidien La Repubblica, conscience de la gauche italienne. Il reprend, après les attentats en Espagne de mars 2004, l'image du révolutionnaire qui doit être dans son milieu comme un poisson dans l'eau et utilise l'expérience de l'éradication du terrorisme dans l'Italie des années de plomb.

"Si les poissons grands et petits du terrorisme nagent dans une eau nutritive et abondante, ils seront imprenables et de toute façon se reproduiront, ils élargiront leur rayon d'action, ils se répandront comme un cancer jusqu'à ce qu'ils infestent tout l'organisme social et le tuent. Il n'existe qu'une recette efficace pour combattre le terrorisme : il faut assécher l'eau qui l'entoure et le laisser à sec et, une fois ceci fait, extirper les racines du phénomène." (La Repubblica du 16 mars 2004).

L'astuce des tarnaciens est de montrer qu'ils ne pratiquent pas de méthodes terroristes comme les brigades rouges alors qu'ils en ont le même modèle intellectuel : ils veulent par leurs actions symboliques accélérer les prises de conscience. Les assimiler à des terroristes comme le voudrait le pouvoir est exagéré et ils ont raison sur ce point. Leur attitude n'en est pas moins injustifiable car elle nie les règles de l'action politique : il faut donc "assécher l'eau qui les entoure" en n'ayant aucune complaisance vis-à-vis de leur action.

Pour "extirper les racines du phénomène", il faut agir contre la crise et la financiarisation de l'économie : il faut s'attaquer aux prélèvements indus qui sont générés par la mondialisation de l'économie et par exemple employer des armes qui ont montré leur efficacité planétaire comme le boycott. Mais ce genre d'action fait appel à l'intelligence humaine et ne cherche pas à frapper les imaginations par un geste violent symbolique : c'est plus difficile, mais plus efficace. Le cercle vicieux de la répression protestation doit être cassé : il faut juger rapidement les actes commis et eux seuls. Mais si, face au traitement actuel de la crise, l'indignation est nécessaire, l'action collective non violente l'est encore bien davantage.
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Jeu 10 Mar 2011 14:10

Article de Karl Laske à paraître... demain jeudi 10 Mars 2011 dans Libération.
_________________________________________

Tarnac : l’épicerie était sur écoute sauvage
Justice. Une plainte a été déposée par les militants.

C’est une opération secrète, et peut-être l’une des clés de l’affaire de Tarnac. Il y a un an, l’un des gérants de l’épicerie du village corrézien a révélé avoir découvert l’existence d’un dispositif d’écoutes visant leurs lignes téléphoniques, huit mois avant leur mise en cause dans les sabotages des lignes TGV. En mars 2008, des barbouzes, ou des policiers, s’étaient mis au travail sans qu’on sache encore pourquoi et sur ordre de qui.

L’écoute sauvage, confirmée par des agents de France Télécom, n’est jamais apparue au dossier d’instruction. Au nom de Benjamin Rosoux, cogérant de l’épicerie de Tarnac, Me William Bourdon vient de déposer plainte auprès du procureur de Brive-la-Gaillarde pour «interception de correspondances» et «atteinte à l’intimité de la vie privée». «Il y a un fil rouge dans ce dossier, c’est celui de la manipulation, commente Me Bourdon, et cette enquête démontrera l’existence d’écoutes clandestines, antérieures à la procédure, en violation de la loi.» Alors que les juges antiterroristes se sont désintéressés de ces faits, l’avocat a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) pour obtenir de France Télécom un historique du suivi technique des lignes de l’épicerie. L’opérateur avait répondu que «les données 2008» n’étaient «plus consultables». Mais la Cada a jugé que, si France Télécom devait répondre de la fourniture de l’accès téléphonique, il n’en était pas de même pour son intervention technique,
qui n’est plus de son ressort exclusif.

L’opérateur a opté pour le silence. Et pour cause : il a engagé une procédure disciplinaire contre Gilles C., l’agent qui a découvert et débranché le système d’écoute devant l’un des gérants de l’épicerie, le 4 avril 2008. Le terminal de carte bancaire des militants épiciers ne fonctionnait plus normalement. «L’écoute provoquait un affaiblissement des signaux, a expliqué à Libération un délégué du personnel de France Télécom. L’agent a coupé la dérivation et rétabli la ligne. Puis il a appelé le chef de département qui lui-même a averti le service national qui s’occupe des écoutes.» Très vite, le technicien fait l’objet d’une mise à pied et de quinze jours de suspension, pour avoir laissé entrer un particulier avec lui dans le central téléphonique.

Il est donc «avéré que les interceptions des lignes téléphoniques ont eu lieu», concluent les plaignants, qui jugent «extrêmement probable» que les commanditaires des écoutes «soient les forces de l’ordre en charge de l’enquête de Tarnac». Or, signalent-ils, «l’enquête préliminaire dans l’affaire n’ayant été ouverte que le 16 avril 2008, à la date des interceptions, aucun fondement juridique ne pouvait justifier une quelconque écoute».
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Sam 12 Mar 2011 13:21

Le cogérant de l'épicerie de Tarnac dépose plainte pour atteinte à la vie privée
SAMEDI 12 MARS 2011 - 05:30

Benjamin Rosoux, le cogérant de l'épicerie de Tarnac, a déposé plainte auprès du tribunal de Brive pour « atteintes à l'intimité de la vie privée » et « interception de correspondances ».

L'affaire de Tarnac n'en finit plus. Entre méandres judiciaires et recours déposés par la défense. Après les saisines, Me William Bourdon, l'avocat de Benjamin Rosoux, cogérant de l'épicerie de Tarnac, est passé au cran supérieur. Voilà quelques jours, il a déposé plainte pour « atteintes à l'intimité de la vie privée » et « interception de correspondances » auprès du tribunal de grande instance de Brive (*).
La plainte intervient dans le cadre des écoutes téléphoniques découvertes à l'épicerie. La défense soupçonne la police de les avoir effectuées sans l'autorisation d'un magistrat et bien avant l'ouverture de toute enquête préliminaire. Une pièce de plus à rajouter au dossier pour attaquer, une nouvelle fois, une instruction jugée « fragile » par les conseils des « dix de Tarnac ».

" Montrer que le dossier est bancal "
« Le cogérant de l'épicerie a souhaité déposer plainte sur cette affaire d'écoutes téléphoniques pour démontrer une évidente manipulation policière et un affranchissement des forces de l'ordre sans l'autorisation d'un magistrat, explique-t-on au cabinet parisien de Me Bourdon. Certaines procédures n'ont pas été respectées. Pour ces écoutes clandestines antérieures à la procédure, il y a même eu des dommages collatéraux (un agent de France Télécom qui était intervenu pour débrancher le système d'écoute a été suspendu de ses fonctions durant plusieurs jours, NDLR). Il s'agit pour nous, à travers toutes ces plaintes, de montrer que le dossier est bancal ».

Contacté, le procureur de Brive n'a pas souhaité commenter le dépôt de plainte.

(*) Le tribunal de Brive est la juridiction compétente car situé dans le département de l'infraction présumée.

Magali ROCHE

magali.roche@centrefrance.com
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Sam 19 Mar 2011 19:53

2 livres (passés un peu inaperçus)... librement "inspirés" de "l'affaire de Tarnac" :

- "Tomates" de Nathalie Quintane, éditions POL 2010
(premières pages : http://www.pol-editeur.com/pdf/6378.pdf)
(en conversation avec Eric Hazan : )

- "Tarnac, un acte préparatoire" de Jean-Marie Gleize, éditions du seuil 2011
(très courte présentation sur le site de l'éditeur :
http://www.seuil.com/fiche-ouvrage.php? ... 2021028348)
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mer 23 Mar 2011 21:19

Le monde appartient à ceux qui se soulèvent tôt

LEMONDE.FR | 23.03.11 | 09h10

Que la sociologie prenne souvent parti pour le maintien de l'ordre, c'est un fait connu, mais il est plus inhabituel de voir un sociologue s'engager carrément du côté de la police. Tel est pourtant le cas de l'auteur d'un article intitulé "Démasquer les méthodes du collectif de Tarnac" publié le 7 mars sur Le Monde.fr
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html.

Comme dans une garde à vue, M. Cibois feint de comprendre l'inverse de ce qu'ont écrit les "mis en examen de Tarnac" dans une tribune publiée dans Le Monde daté 24 février
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html
: "Il importe peu de savoir à qui, pour finir, on imputera les actes qui furent le prétexte de notre arrestation." Tenir ces lignes pour un aveu, ou pire, pour la revendication des actes en question : il faut pour cela avoir l'âme d'un policier ou d'un juge d'instruction antiterroriste.
Quiconque a un peu suivi l'affaire sait que les sabotages en question ont été revendiqués par un groupe allemand le jour même des faits, que le crochet est comme une signature des antinucléaires allemands, et que cette méthode ne comporte aucun danger pour la vie humaine. La dernière fois que la France a convoyé outre-Rhin des déchets nucléaires, il s'est trouvé quelque 50 000 personnes pour essayer de bloquer le convoi. Traiter de "terroristes" ceux qui s'opposent à l'empoisonnement du monde par le lobby nucléaire relève de la terreur d'Etat.

Si l'on s'en tient aux faits, cette affaire se réduit à la tentative désespérée d'attribuer à deux personnes un sabotage, celui de Dhuisy, en
Seine-et-Marne. Ce sabotage n'a d'ailleurs arrêté aucun train. Il a endommagé huit petits bouts de plastique qui ont été changés en un
tourne-main par la SNCF – ce qui a peut-être coûté deux ou trois mille euros, à mettre en balance avec les deux ou trois millions d'euros de
frais engagés pour l'instruction de l'affaire. Cette disproportion entre les faits et la procédure est bien la preuve – l'une des preuves – du
caractère politique de cette instruction.

Un sociologue n'est pas tenu d'être historien, c'est vrai, mais il y a des limites à l'ignorance. M. Cibois propose de déployer contre les gens de Tarnac les méthodes utilisées par l'Etat italien contre les Brigades rouges dans les années 1970. Il reprend même à son compte la métaphore répandue à l'époque : "Assécher la mer pour prendre le poisson." Cette riche idée, dont la "démocratie" italienne ne s'est jamais relevée, a signifié : lois d'exception, torture, tirs à balles réelles sur des manifestants, rafles massives, assassinats ciblés. Francesco Cossiga, ministre de l'intérieur de l'époque, a reconnu plus tard avoir mené une guerre. M. Cibois, partisan de "l'action collective non violente", propose donc de mener "dans une démocratie comme la France" une guerre du même genre. On reconnaît là une pensée que M. Cibois partage avec son collègue Alain Bauer, comme lui prêt à tout pour défendre "la société". Il est vrai que pour un sociologue, la société est en quelque sorte un gagne-pain.

"Il n'est pas possible, écrit M. Cibois, d'identifier la France avec la Tunisie de Ben Ali sous prétexte de persécutions policières." En effet, l'empilement des lois sécuritaires depuis dix ans – avec, dernière en date, une Loppsi 2 digne de la présente démocratie chinoise – n'est pas le seul symptôme de la "Benalisation" du régime en France. Il faut y ajouter le placement de proches du président, voire de sa famille, à des postes-clefs de l'économie et des médias, le caractère tristement fantoche de l'opposition officielle, l'extension de la misère dans un corps social dont les "élites" se disputent les derniers morceaux de choix. Sans compter le chiffre annuel record des gardes à vue, les yeux crevés au flashball, les morts du taser, les étouffés dans les fourgons de police, les chauffards abattus aux barrages "en légitime défense". En attendant que M. Cibois et consorts aient fini de soupeser la légitimité de l'insurrection, soutenons, appuyons tous ceux qui sont entrés en lutte ouverte avec ce régime. Le monde appartient à ceux qui se soulèvent tôt.

Eric Hazan, éditeur
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede denis le Jeu 24 Mar 2011 00:13

Excellent !

:drapA:
Qu'y'en a pas un sur cent et qu'pourtant ils existent, Et qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous, Joyeux, et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout !

Les Anarchistes !
Avatar de l’utilisateur
denis
 
Messages: 913
Inscription: Mer 26 Jan 2011 19:48
Localisation: Oraison, Alpes de Haute Provence, le zéro-quatre

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Lun 28 Mar 2011 21:39

Tarnac: trois plaintes visent la police antiterroriste Par Louise Fessard
[Paru le 26 mars 2011 sur mediapart.fr]

Après la reconstitution de la nuit du 13 au 14 janvier 2011 qualifiée de «simulacre» par leurs avocats, les dix mis en examen du groupe de Tarnac s'attaquent aux deux pièces maîtresses de l'enquête menée par le juge antiterroriste Thierry Fragnoli sur le sabotage de la ligne TGV-Est dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008. A savoir la déposition anonyme du 14 novembre 2008 qui présentait Julien Coupat comme capable de tuer pour ses idées ; et le procès-verbal de filature de Yildune Lévy et Julien Coupat
dans la nuit du 7 ou 8 novembre, qui démontrerait leur présence à proximité des lieux du sabotage sur la ligne TGV-Est.

Les mis en examen de Tarnac ont récemment déposé trois plaintes contre X : pour subornation de témoin (au tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, le 23 février 2011), pour interception de correspondances et atteinte à l'intimité de la vie privée (au TGI de Brive-la-Gaillarde le 25 février), et pour faux et usage de faux en écriture publique (au TGI de Nanterre le 1er mars).

Le 7 novembre, une vingtaine de policiers de la Sdat (sous-direction antiterroriste) et de la DCRI (direction centrale du renseignement intérieur) filent depuis son départ de Paris la Mercedes de Julien Coupat et Yildune Lévy, membres de l'«ultra-gauche, mouvance anarcho-autonome».
Le couple, qui se sent suivi, joue pendant plusieurs heures au chat et à la souris avec eux sur des petites routes de Seine-et-Marne aux abords de la ligne TGV-Est.

Après avoir dîné dans une pizzeria puis dormi quelques heures dans leur voiture à Trilport, Julien Coupat et Yildune Lévy seraient, selon les agents du Sdat, revenus à proximité de la ligne TGV, à Dhuisy (à 26 kilomètres de Trilport). En pleine nuit, ils auraient stationné une vingtaine de minutes sur une voie de service, proche de l'endroit où sera découvert au matin un crochet métallique posé sur les caténaires de la ligne LGV. Puis ils repartent à Paris.

Mais la plainte pour faux et usage de faux en écriture publique, déposée par Yildune Lévy et Julien Coupat, pointe de nombreuses failles dans les récits des policiers. Et notamment dans le récit de la filature, connu sous le nom de PV 104 et daté du 8 novembre 2008, qui constitue, selon les conseils des jeunes gens, l'unique élément à charge retenu contre le couple.

Les nouvelles précisions apportées en mars 2010 par deux agents de la Sdat (le lieutenant Mancheron et le capitaine Lambert), à la demande expresse du juge, ne font qu'empirer la chose, puisqu'ils se contredisent eux-mêmes sur plusieurs points cruciaux. «C'est Dupond et Dupont», s'amuse l'un des avocats du groupe, Me Jérémie Assous. Chronologie.

Une silhouette sur les voies ?

3h50. Selon le PV 104, la Mercedes, qui «cheminait à allure normale», parcourt les 26 kilomètres entre Trilport et Dhuisy en dix minutes. Soit une petite moyenne de 160 km/heure. Les policiers de la Sdat prétextent depuis une erreur de «transcription». Ils indiquent avoir confondu le chiffre «3» et le chiffre «5».


4h. La Mercedes de Julien Coupat se gare près de la voie ferrée. Les enquêteurs sont incapables de se mettre d'accord sur son emplacement exact, un coup à droite du pont de la voie ferrée, un coup à gauche, voire carrément sous ou sur le pont. Selon le PV 104, le véhicule a été observé à l'arrêt «sur la voie de service au pied du pont de chemin de fer». C'est cette voie secondaire à droite du pont que les gendarmes choisissent d'ailleurs de «geler» pour préserver les éventuelles preuves. Mais d'après la nouvelle version de mars 2010 du capitaine Lambert, la Mercedes aurait en fait été garée sur une autre voie de service, à gauche du pont.

Certains procès-verbaux évoquent la présence d'un individu sur la voie de la ligne ferroviaire entre 4h et 4h20. D'après le lieutenant colonel Gosset, un gendarme chargé des constatations, un officier de la Sdat lui aurait déclaré le 8 novembre au téléphone que la personne suivie «a accédé à l'emprise de la voie ferrée à l'endroit du sabotage sans qu'il puisse déceler ses agissements».

Curieusement, les enquêteurs de la Sdat se montrent plus prudents dans leurs PV et se gardent bien de mentionner une silhouette sur les voies.
«Eu égard à la configuration du terrain, les policiers n'ont pas pu observer directement les individus sans risque d'être détectés par eux», relate le PV 104.

Le capitaine Lambert précise même dans son procès-verbal de mars 2010, que «le chauffeur du véhicule 1 (...) s'est avancé à pieds sur la route pour monter en haut d'une butte formée par la chaussée (...). C'est après avoir parcouru plusieurs centaines de mètres que le fonctionnaire a pu distinguer brièvement à l'aide du matériel d'intensification de lumière le véhicule Mercedes qui était stationné sur la voie d'accès à l'emprise SNCF».

Pourquoi après avoir parcouru plusieurs centaines de mètres, se contenter d'observer «brièvement» le véhicule sans se soucier du comportement de ses occupants, pourtant soupçonnés d'avoir des intentions criminelles ? Selon les avocats, la reconstitution du 13 janvier 2011 jette un doute supplémentaire sur l'authenticité des récits des policiers.

«Il a été constaté que si un individu avait été présent près du véhicule Mercedes, lorsque celui-ci était stationné sur la voie d'accès à l'emprise SNCF, il aurait nécessairement été aperçu par le conducteur du véhicule V1 à l'aide de son matériel d'intensification de lumière», expliquent-ils.
Surtout s'il a été fait usage d'une lampe frontale, comme le suggèrent les policiers, qui ont par la suite retrouvé un emballage de lampe parmi les objets jetés par Julien Coupat dans une poubelle de Trilport.

4h20. La Mercedes redémarre. Une partie des policiers poursuivent la filature. Que font les autres policiers restés sur place ? Mystère, car «il n'y a aucune précision apportée sur la surveillance de la Sdat entre 4h20 et 5 heures», indiquent les avocats.

Nouveau record à 324km/h

5h. Les policiers restants effectuent, selon le PV 104, «une minutieuse recherche aux abords immédiats de la voie ferrée et du pont de chemin de fer». D'après cette première version, les policiers se positionnent «à l'endroit exact où le véhicule a été observé à l'arrêt». Au contraire, selon la deuxième version de mars 2010, «les véhicules du dispositif restés sur place se sont stationnés (...) du côté opposé au lieu où était stationné le véhicule Mercedes».

Ce «afin de ne pas polluer les lieux où pouvaient avoir été commise une infraction». Mais relèvent les avocats, ces policiers si soucieux de ne pas «polluer les lieux», n'en inspectent même pas les abords et n'effectuent aucun gel des lieux au fin de préservation des traces et indices. Et ils ne semblent pas avoir pris la peine de prévenir la gendarmerie ou la SNCF de l'endroit de stationnement de la Mercedes de Julien Coupat.

«A l'évidence, s'ils avaient été avisés (...), la SNCF n'aurait pas stationné son camion sur la voie de service principale, et la gendarmerie n'aurait pas relevé de traces et d'indices que la Sdat revendique à présent comme siens», remarquent les avocats.

Une équipe de la Sdat se rend donc sur la voie de chemin de fer «en enjambant le grillage» selon le capitaine Lambert. Sacrée enjambée puisque la clôture métallique et les portails mesurent environ deux mètres de haut, selon les constats des gendarmes.

Le capitaine raconte alors que «ne découvrant aucun indice suspect, les fonctionnaires sont revenus sur leurs pas et c'est alors qu'ils venaient de dépasser le pont à 5h10 qu'un TGV arrivant de Paris a été repéré et qu'il a été donné pour ordre (...) aux effectifs de s'écarter de la voie ferrée (...). Ceux-ci ont alors sauté dans le talus situé de part et d'autre de la voie ferrée». Selon le PV 104, certes moins épique, les policiers n'ont pas du tout été surpris par le TGV. Ils sont «par mesure de précaution, restés sur place jusqu'au passage du TGV chargé de l'ouverture de voie».

Le passage du premier TGV provoque, selon le PV 104, «une gerbe
d'étincelle au niveau de la caténaire accompagné d'un bruit sec».

5h25. Selon le capitaine Lambert, «l'ensemble des effectifs ont quitté la zone immédiatement (après l'inspection des voies, ndlr) pour se rendre sur la commune de Trilport». Mais d'après le tableau de trafic téléphonique fourni en juin 2010 par la police, les enquêteurs sont encore à Dhuisy à 5h25, d'où ils passent plusieurs appels à leur hiérarchie.

5h30. Selon le PV 104, les policiers sont de retour à Trilport. Ils fouillent la poubelle où ils ont vu Julien Coupat jeter des objets quelques heures plus tôt. Un nouveau record est pulvérisé. Les enquêteurs auraient donc parcouru un trajet de 26 kilomètres en cinq minutes, à la vitesse de 324 km/heure. Deux fois plus vite que la Mercedes de Julien Coupat et Yildune Lévy à l'aller.

5h50. Les policiers quittent Trilport, après avoir trouvé un emballage de lampe frontale et des plans du réseau TGV dans la poubelle. Derner hic, le tableau de trafic téléphonique signale des appels des enquêteurs depuis Dhuisy jusqu'à six heures du matin, alors qu'ils sont tous censés être partis depuis longtemps.

«Ils n'ont rien vu»

Et pendant ce temps que font les policiers qui suivent la Mercedes ? A 4h45, selon le PV 104, ils constatent que «le véhicule s'arrête au pied du pont de La Marne sur la commune de Trilport, puis après quelques minutes repart en direction de Paris». Plus d'un an après, le 24 mars 2010, des plongeurs repêchent à l'aplomb du pont de La Marne, plusieurs tubes de PVC ayant pu servir à poser le crochet métallique sur les câbles de la voie à grande vitesse.

Selon le Nouvel Obs, les enquêteurs soupçonnent Julien Coupat d'avoir acheté ces tubes de PVC le 7 novembre dans un Bricorama de Châtillon alors qu'ils avaient perdu sa trace entre midi et 14h50. «Il était suivi à bonne distance grâce à une balise GPS placée sur sa vieille Mercedes», explique la source «proche de l'enquête» du Nouvel Obs. A midi le signal disparu comme cela arrive quand la cible entre dans un parking souterrain. Et justement le Bricorama de Châtillon en possède un pour ses clients.»

Oups ! La pose d'une balise GPS est illégale si elle n'a pas été autorisée par un juge. «Si cette information s'avérait justifiée, elle pourrait démontrer l'absence d'authenticité du PV 104, les services de police ne pouvant raisonnablement déclarer procéder à des constatations visuelles alors qu'ils ne faisaient que suivre une balise», écrivent les avocats.

Conclusion : une vingtaine de policiers chevronnés ont suivi le couple pendant un jour mais «ils ne les ont pas vus à côté de la voie ferrée, ni en train de poser les fers à béton, ni les jeter dans la Marne, ils n'ont rien vu quoi», ironise Me Thierry Levy. Fort opportunément, le 14 novembre, alors que neuf membres du groupe de Tarnac sont en garde à vue depuis trois jours, un témoin sous X apporte de nouveaux éléments.

Entendu par deux officiers de police judiciaire de la Sdat, il décrit les gardés à vue comme «un groupe sectaire dont les membres ont été endoctrinés par Julien Coupat». Ce dernier «souhaite le renversement de l'Etat par le biais d'actions de déstabilisation qui auraient pu aller jusqu'à des actions violentes».

«Une volonté de tromper»

«C'est ce témoignage, les présentant comme un vrai groupe criminel, qui va donner l'apparence de sérieux aux interpellations, car les filatures n'ont pas donné grand-chose», estime un des avocats du groupe, Me Thierry Lévy. Alors que la rumeur sur l'identité de ce témoin crucial se répand dans les médias, la Sdat l'entend à nouveau le 11 décembre 2008 mais cette fois sous son vrai nom, Jean-Hugues Bourgeois, éleveur bio dans le Puy-de-Dôme de son état.

Le discours est inversé, Jean-Hugues Bourgeois déclare tout ignorer du projet politique du groupe de Tarnac. «Le but semblait être de noyer le poisson en me faisant apparaître parmi d'autres témoins», expliquera Jean-Hugues Bourgeois au juge, le 26 novembre 2009.

«A ce moment là, seuls les enquêteurs de la Sdat savent qu'il s'agit de la même personne, qui a témoigné une fois sous X et l'autre fois sous sa vraie identité, mais ils n'en avisent personne, dit Me Louis Marie de Roux, l'un des avocats des mis en examen. Il y a une volonté de tromper tout le monde.»

Un an plus tard, interviewé par TF1, Jean-Hugues Bourgeois explique que manipulé par la Sdat, il a signé une déposition sous X préparée à l'avance. «Le mec (l'OPJ de la Sdat, ndlr) m'explique très posément que (...) le problème c'est qu'il y a tout un tas d'infos, d'interceptions de mails, d'infos de gars infiltrés en squat, ce genre de choses, qui ne sont pas exploitables dans une procédure judiciaire et que juste ils ont besoin d'une signature», raconte Jean-Hugues Bourgeois.

Interrogé dans la foulée par le juge, l'agriculteur fait état de pressions mais refuse d'être plus précis et de revenir sur les faits. Yildune Lévy et Julien Coupat ont donc déposé une plainte contre X pour subornation de témoin.
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mar 29 Mar 2011 18:22

Tarnac : une QCP examinée par la Cour de cassation

le 29/03/2011 10h40

Une question prioritaire de constitutionnalité (QCP) déposée par la défense de Julien Coupat doit être examinée ce mardi après-midi devant la Cour de cassation du palais de justice de Paris. Le groupe de Tarnac conteste notamment le fait qu'on ait écarté des débats pour des seules raisons de délai ainsi que des actes de procédure dont l’irrégularité serait avérée. Il s'agit notamment de la surveillance visuelle du domicile de Julien Coupat, mise en place en 2008 par les policiers sans autorisation. Julien Coupat, sa compagne et huit autres personnes sont mises en examen, notamment pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, après des sabotages sur les lignes TGV en 2008.
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mer 30 Mar 2011 19:21

Patrice Spinosi, avocat de Julien Coupat
Tarnac : nouvelle tentative de la défense pour faire annuler une partie de l'enquête
LEMONDE.FR | 29.03.11 | 18h31 • Mis à jour le 29.03.11 | 18h53

La défense du groupe de Tarnac, ces dix personnes mises en examen pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste après des sabotages de lignes SNCF fin 2008 , a fait, mardi 29 mars, une nouvelle tentative pour faire annuler une partie de l'enquête qu'elle estime entâchée d'irrégularités. L'un des avocats de Julien Coupat, Me Patrice Spinosi, a plaidé devant la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) – nouvelle procédure permise par la révision de la Constitution et rendue célèbre par le récent procès de Jacques Chirac – sur laquelle la Cour pourrait se prononcer dès mercredi matin.

Sur quels points cette question prioritaire de constitutionnalité portait-elle ?

Dans le dossier, au début de l'instruction, le domicile de Julien Coupat a été placé sous surveillance par les policiers en août 2008 sans autorisation. Nous avons donc demandé l'annulation des pièces de la procédure liées à cette surveillance. Mais cette nullité a été refusée en octobre 2010 par la cour d'appel de Paris, non parce qu'elle a estimé que cette surveillance était légale : elle n'a pas jugé sur le fond. Elle a rejeté la nullité, car cette demande a été faite trop tardivement dans l'instruction. En France, aujourd'hui, la défense n'a que six mois pour relever la nullité de pièces du dossier. Et dans cette affaire, elle n'a été demandée qu'au bout d'un an et demi environ. Mais le parquet, lui, a jusqu'à la fin de l'instruction. Il y a donc ici atteinte au principe d'égalité des armes. Notre QPC consiste donc à exiger que désormais, sur ce point, les droits de la défense s'alignent sur ceux de l'accusation, et que n'importe quel mise en examen puisse demander la nullité d'une pièce jusqu'à la fin de l'instruction. Car imaginez, de façon plus générale : un mis en examen change d'avocat au bout d'un an et celui-ci remarque des irrégularités dans le dossier que son prédécesseur n'avait pas vues. Aujourd'hui, il ne peut pas en demander la nullité.

Ce que vous reprochez à la procédure judiciaire en cours, c'est que personne n'a jamais remis en cause cette surveillance sans autorisation ?

Oui. Il est quand même extraordinaire qu'on doive se battre pour qu'un juge veuille bien examiner le contenu du dossier qui contient un certain nombre de pièces irrégulières. On est là dans une affaire ultra-sensible, où les policiers ont commis de nombreuses fautes. On ne peut quand même pas condamner quelqu'un sur la base de pièces obtenues de façon illégale ! Et cette loi qui limite le temps laissé à la défense pour dénoncer des pièces a jusqu'ici empêché qu'un juge se penche sur le fait que les policiers n'étaient pas autorisés à surveiller le domicile de Julien Coupat. Et qu'ils ont commis une atteinte grave à ce droit fondamental qu'est en France le droit à la vie privée. Pour une simple raison de délai, les pièces obtenues sans autorisation seraient recevables ? C'est inacceptable.

Vous avez plaidé mardi devant la Cour de cassation. Quelle est la prochaine étape ?

La Cour doit décider si elle transmet, ou pas, notre QPC au Conseil constitutionnel. On pourrait avoir la réponse dès mercredi matin. Si la réponse est négative, alors nous pourrions saisir la Cour européenne des droits de l'homme. Si la réponse est positive, alors le Conseil constitutionnel devra examiner notre question. Il faut changer cette loi qui impose ce délai de six mois et aligner le régime de l'ensemble des parties sur celui du parquet. Cette procédure existait d'ailleurs dans le droit français jusqu'en 1993, et n'a été changée que pour des questions d'organisation, de gestion administrative. Cela ne peut prévaloir sur le respect d'une liberté fondamentale. Si ce verrou était remis en cause, alors cela nous permettrait une nouvelle saisine de la chambre d'instruction qui pourrait entraîner l'annulation d'une partie importante du dossier contre Julien Coupat et les autres mis en examen.
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Lun 4 Avr 2011 22:45

[url=http://www.humanite.fr/03_04_2011-en-matière-dantiterrorisme-rien-nest-tout-blanc-ni-tout-noir-469192]"En matière d'antiterrorisme, rien n'est tout blanc ni tout noir"[/url] Marc Trévidic - SOCIÉTÉ - le 3 Avril 2011

Pour le juge antiterroriste Marc Trévidic, la principale menace qui pèse sur ses fonctions tient à la confusion entre affaires à la teneur réellement terroriste et les autres. Le terme même de terrorisme lui apparaît toujours susceptible d'être instrumentalisé. Refusant tout manichéisme, le juge considère qu'on peut récupérer certains jeunes égarés dans le terrorisme.

En février, on l'a entendu porter avec humour et sans détour la voix des juges en colère contre les attaques répétées de Nicolas Sarkozy contre l'institution judiciaire. Marc Trévidic, juge antiterroriste et secrétaire général de l'Association des magistrats instructeurs, n'a pas la langue dans sa poche. Son livre, Au cour de l'antiterrorisme, est une plongée à la première personne dans les coulisses d'une justice souvent secrète, l'antiterrorisme. Sans langue de bois et sans évacuer les problèmes éthiques rencontrés dans l'exercice de ses fonctions.

(...)

"Ne considère-t-on pas un peu trop rapidement comme terroristes des personnes qui ne s'en prennent qu'aux biens et pas aux personnes ?"


Á ce titre, que pensez-vous du traitement de l'affaire Tarnac ?

Marc Trévidic. J'évite toujours d'en parler parce que ce sont des collègues qui l'instruisent. C'est le problème d'une atteinte aux biens qualifiée terroriste : il faut voir de l'intérieur si ça tient. Je prends souvent un exemple : la personne qui faisait sauter des radars. Au départ, on pourrait très bien se dire qu'après tout il ne terrorise personne. Ou, avec un peu d'humour : il rend plutôt service. Mais si vous allez sur les lieux et que vous constatez que le radar est à un mètre de la route, qu'un motard qui passe peut être tué par un éclat de radar, vous avez déjà une vision du dossier un peu différente. Il faut regarder concrètement chaque dossier. Je ne peux pas répondre sur Tarnac parce que, pour savoir si la qualification est tenable ou pas, il n'y a que ceux qui connaissent très bien le dossier qui peuvent le dire. De toute façon, le problème reste: ne considère-t-on pas un peu trop rapidement comme terroristes des personnes qui ne s'en prennent qu'aux biens et pas aux personnes ? C'est un problème de fond.

(...)
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Sam 9 Avr 2011 14:02

[url=http://humanite.fr/07_04_2011-tarnac-le-récit-intérieur-et-communautaire-de-linsurrection-469510]Tarnac, le récit intérieur et communautaire de l'insurrection[/url]
Á partir du raid policier sur ce village limousin, le 11 novembre 2008, Jean-Marie Gleize pose la question de l'inscription de la politique en poésie : la question révolutionnaire est pour lui une « question musicale ».

Tarnac, un acte préparatoire,Jean-Marie Gleize Éditions du Seuil. 164 pages, 18 euros.

Pour qu'il y ait « association de malfaiteurs en vue de commettre une action terroriste », il suffit : premièrement, d'être plus d'un, deuxièmement, d'avoir accompli un « acte préparatoire ». Le lien entre l'« acte préparatoire » et l'« action » en elle-même n'est pas défini, non plus que celui qui unit les membres du « groupe ». En clair, n'importe quoi peut préparer au terrorisme, et n'importe qui, faire partie de la bande. Magie des mots qui peuvent envoyer au secret des jeunes gens contre qui aucun acte précis n'a pu être retenu. De quoi intéresser un poète. Avec cet autre fait : le seul élément du dossier constitué contre Julien Coupat et ses amis, mis à part le fait de ne pas avoir de portable et de tenir une boutique autogérée dans un village déserté par les commerces, est d'avoir - peut-être - écrit un livre dont le titre comprend le mot inquiétant d'« insurrection ». Qu'auraient-ils fait de « la constante insurrection de l'herbe » plusieurs fois répétée dans le Pré, de Francis Ponge, semble demander Jean-Marie Gleize, qui cite le texte à plusieurs reprises ?

Est-ce cela qui a déclenché chez lui la nécessité d'écrire ce Tarnac, acte préparatoire qu'il nous propose aujourd'hui ? Cela, parce qu'on poursuit aujourd'hui, à nouveau, pour vouloir « changer l'état de choses existant ». « Tarnac sera le nom d'un récit intérieur et communautaire », annonce l'auteur d'emblée, car « la question révolutionnaire est désormais une question musicale ». L'ouvrage se présente dès lors comme le tressage de trois fils principaux. L'un est ce qui s'est passé le 11 novembre 2008, quand 150 policiers investissent Tarnac. L'autre, le retour dans le texte de ce mort de dix-sept ans, Gilles Tautin, lycéen, militant maoïste, noyé dans la Seine en tentant, en juin 1968, d'échapper à la police. Le troisième renvoie à cet homme, « F », tertiaire de saint François, dont le livre donne quelques extraits des carnets de méditation, retrouvés dans une boîte en fer-blanc. Histoire de la poussière. Avec quatre photos très sombres de la forêt autour du village. « F » était de Tarnac, comme l'auteur. Ainsi naît de cette nuit, de cette eau qui enferme le corps de Gilles Tautin, de l'actuel et des deux mémoires, une exigence. Devant l'inacceptable, dire « un poème n'est pas une île » est nécessaire. Plus encore de « construire son dialecte » : « Communiste est pour moi ce mot enfermé dans l'eau. » Tarnac contribue ainsi, sans payer tribut aux tentations régressives, à « faire de chaque page un poste de tir ».

Alain Nicolas
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mar 12 Avr 2011 21:39

"Sécurité Globale" se présente comme une - je cite - "revue de référence française consacrée aux questions de sécurité intérieure et aux enjeux sécuritaires internationaux, Sécurité globale offre une plate-forme de recherche et de débats sur des thématiques comme le terrorisme, la criminalité organisée, les crises sanitaires, la gestion des catastrophes naturelles et industrielles. Son approche se veut autant conceptuelle qu’opérationnelle, selon une logique qui vise à éclairer la globalité des enjeux de sécurité de ce XXIe siècle naissant." (!!!) : http://choiseul-editions.com/revues-geo ... le-23.html

La revue est publiée en partenariat avec, entre autres :
"La Fondation pour la recherche stratégique", "le Haut comité français pour la défense civile", "le Centre français de recherche sur le
renseignement", "l'Assemblée française des Chambres de commerce et d'industrie"... (liste complète de son "comité éditorial" et détail des
autres crapules de son "conseil scientifique" : http://choiseul-editions.com/revues-geo ... le-23.html)

Dans son numéro 12, daté Eté 2010, un dossier intitulé "A la recherche de l'ultra-gauche"

Au sommaire, entre autres articles :

- "Renseignement, l’état de la réforme" par BAJOLET Bernard
- "L’ultra-gauche : le retour des autonomes ?" par DAGUZAN Jean-François
- "De quoi Tarnac est-il le nom ? Herméneutique d’une sombre histoire" par RAUFER Xavier
- "Ultra-gauche : le mot, l’idée, l’action" par BAUER Alain et HUYGHE François-Bernard


"De quoi Tarnac est-il le nom ? Herméneutique d’une sombre histoire" par RAUFER Xavier (.pdf)
"L’ultra-gauche : le retour des autonomes ?" par DAGUZAN Jean-François (.pdf)
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede denis le Sam 8 Déc 2012 21:16

Nine a écrit:Quatre heures avec Julien Coupat pour refaire l’histoire de Tarnac :


Quatre heures avec Julien Coupat pour refaire l’histoire de Tarnac
Camille Polloni | Journaliste Rue89


Une discussion à bâtons rompus avec Julien Coupat a mis un terme à quatre ans de quasi-silence de sa part. Mis en examen dans l’affaire de Tarnac pour « direction d’une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », il a donné rendez-vous à neuf journalistes de presse imprimée, web et radio au métro Ménilmontant (Paris, XXe arrondissement) ce lundi matin.

C’est Mathieu Burnel, l’un de ses co-inculpés, qui joue le guide jusqu’à l’appartement d’une de leurs amies, arrêtée en son temps mais jamais poursuivie. Un cortège (calme) se déploie dans l’escalier d’où descend une vieille dame.

La vision de cette conférence de presse improvisée prête à sourire : douze personnes dans un salon, cherchant un peu de place autour d’une table où les attend du café. Julien Coupat arrive un peu à la bourre, pas très à l’aise devant ce parterre de journalistes.
« Le seul moyen de disparaître »

Pour les deux mis en examen présents, l’objectif est clair : porter les derniers coups de boutoir à une affaire agonisante.

Au bout de quatre ans et 35 tomes, l’affaire de Tarnac semble toucher à sa fin. Les dernières avancées connues du dossier sur la carte bleue d’Yldune Levy, le rôle joué par un agent infiltré britannique et l’audition de dix-huit policiers ordonnée par la justice représentent autant d’éléments favorables à la défense.

Dans ce contexte, juge Mathieu Burnel, « l’affaire est terminée d’un point de vue judiciaire et politique ». Mais il reste « cette fiction policière de Julien-le-Chef », « figure monstrueuse puis quasiment figure de star » :

« Le fait qu’il ne s’exprime pas alimente ce fantasme de figure de l’ombre, c’est pour ça que Julien est là aujourd’hui. On ne va pas parler de la marque de ses chaussettes. »

Julien Coupat a toujours refusé les interviews depuis sa sortie de prison en 2009, soit en éconduisant les médias, soit en refusant d’être cité. Cette fois-ci, il n’économise pas sa parole :

« Pendant un certain temps, apparaître c’était comparaître devant je ne sais quel tribunal médiatique. Maintenant, le seul moyen de disparaître, c’est d’apparaître.

Nous avons l’impression d’avoir fait justice de l’ensemble des allégations policières. Ne demeure qu’un seul élément qui pourrait rester dans les esprits : la construction de cette figure de “Julien Coupat”. »

Alors voilà, Julien Coupat est là, une clope à la main, et peut même parler de lui à la troisième personne.
Un exposé méthodique

Les mis en examen procèdent à un long récapitulatif de leur dossier, dont ils connaissent désormais les cotes par cœur, quatre ans et un jour après leurs arrestations. Ils l’attaquent sur trois axes :

L’existence de Mark Kennedy, « point de départ de l’affaire », dont les informations sur le voyage à New York de Julien Coupat et Yldune Levy auraient aiguillé les Renseignements généraux vers le couple. Pour l’intéressé :

« Mark Kennedy correspond à l’idée que l’intensification du renseignement humain et technique permet d’arrêter les gens avant qu’ils ne commettent des crimes, ce que les Britanniques appellent “l’intelligence-led-policy”.

Le “premier cercle du groupe de Tarnac” désigné par les Renseignements généraux ne sont que des gens qui ont croisé Mark Kennedy.

L’enquête préliminaire n’a été ouverte que pour couvrir les écoutes illégales de l’épicerie de Tarnac, découvertes par le gérant une semaine avant [une information judiciaire est ouverte sur ces écoutes, ndlr].

Ensuite, il n’y a rien dans le dossier jusqu’à nos arrestations, malgré les accusations de conspiration internationale violente. »

Le PV de filature de Julien Coupat et Yldune Lévy dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008 (celle des sabotages), contre lequel les mis en examen ont déposé une plainte pour « faux en écriture publique » à Nanterre.

Ils dénoncent « les contradictions de la Sdat » sur les horaires, la position des véhicules, la topographie des lieux, avec « le soutien du juge d’instruction Thierry Fragnoli pour maintenir le dossier ».

La chronologie de cette nuit reprend de l’importance depuis que le compte bancaire d’Yldune Lévy a parlé : la carte bleue de la jeune femme a servi a retirer de l’argent à Paris cette nuit-là, à 2h44. Alors que les enquêteurs sont supposés la suivre en Seine-et-Marne.

Pour Julien Coupat, l’affaire est entendue : « On leur a dit clairement qu’on n’était pas là au moment des sabotages. »

« Nous sommes partis de Paris où nous étions sous surveillance, le 7 novembre. En prenant la nationale, nous nous apercevons que nous sommes toujours suivis alors on se casse dans les petites routes de campagne.

Nous jouons au chat et à la souris avec la police pendant une heure et demie ou deux heures. Après s’être arrêtés pour manger, nous demandons une chambre dans un hôtel complet.

On dort dans la voiture, sans regarder combien de temps, à notre réveil on part à l’écart pour faire l’amour puis on décide de rentrer à Paris.

C’est vrai que nous n’avons pas regardé l’heure, ne sachant pas qu’on devrait un jour s’en justifier. Et en garde à vue, on ne nous a pas posé de questions sur cette chronologie. Mais nous avons la même version des faits depuis le début alors que la police en a changé quatre fois. »

Le témoignage de Jean-Hugues Bourgeois, jeune agriculteur à proximité de Tarnac, entendu sous X, dont l’identité a été révélée par TF1 en 2009.

« Seul élément du dossier qui fait tenir la direction d’une association de malfaiteurs », affirme Mathieu Burnel, « puisque ce témoin dit que Julien est le chef et qu’il est très méchant ».

« Bourgeois sert à consigner la trame policière », renchérit Coupat. De concert, les deux mis en examen attaquent la crédibilité de Bourgeois, qui a accusé la police de subornation avant de se rétracter et a livré des témoignages contradictoires.
Finalement, c’est qui ?

En se prêtant au jeu des questions, Julien Coupat et son camarade communiquent sur leurs activités politiques « loin de la clandestinité groupusculaire : l’épicerie était le lieu le plus ouvert de Tarnac ».

« Non », ils n’ont pas écrit « L’Insurrection qui vient », « oui », ils participent à des mouvements sociaux depuis des années, « oui », ils se savaient surveillés avant même leur arrestation et trouvaient ça « insupportable ».

La conversation s’élargit sur le fonctionnement de la justice antiterroriste lui-même, décrit par Coupat :

« L’affaire de Tarnac est la norme dans la procédure antiterroriste, pas une exception.

Le seul hic c’est que généralement, les policiers se retrouvent face à des gens que personne ne soutient, dans des affaires où personne ne remet en cause leur travail. »

Quatre heures, douze tasses vides et deux cendriers pleins plus tard, une question finale s’élève du canapé :

« Finalement, vous pensez que c’est qui qui a posé les fers à béton ? »

« Ce n’est pas à nous de répondre à cette question », concluent les mis en examen, après avoir toutefois évoqué plusieurs fois la revendication allemande laissée de côté par les enquêteurs.

Fidèle à lui-même, Julien Coupat refuse finalement de parler au micro des journalistes radio, dépités :

« On se voit, on se parle et vous écrivez ce que bon vous semble, mais je n’ai pas envie d’apparaître. Si c’est Mathieu qui vous parle, c’est pareil, nous disons la même chose. »

Mercredi, une conférence de presse réunissant les avocats des mis en examen et plusieurs parlementaires doit se tenir à l’Assemblée nationale. Le thème : « Pour en finir avec l’affaire de Tarnac », écrivent ses organisateurs.


http://www.rue89.com/2012/11/12/quatre- ... nac-236966



http://forum.anarchiste-revolutionnaire ... 712#p80772
Qu'y'en a pas un sur cent et qu'pourtant ils existent, Et qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous, Joyeux, et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout !

Les Anarchistes !
Avatar de l’utilisateur
denis
 
Messages: 913
Inscription: Mer 26 Jan 2011 19:48
Localisation: Oraison, Alpes de Haute Provence, le zéro-quatre

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede denis le Sam 8 Déc 2012 21:17

Nine a écrit:Les avocats des inculpés de Tarnac déposent une plainte contre les policiers pour "subornation de témoin"


Affaire de Tarnac. La défense repasse à l'attaque

Les avocats du groupe de Tarnac ont fait état mercredi de nouveaux éléments prouvant, selon eux, que les policiers ont falsifié certains éléments de leur enquête, en particulier la filature de Julien Coupat à proximité de la voie TGV sabotée en novembre 2008.


Selon Me Jérémie Assous, l'analyse du trafic téléphonique sur l'antenne installée au pied du lieu du sabotage à Dhuisy (Seine-et-Marne) montre qu'il n'y avait pas de policier à cet endroit à 04h du matin dans la nuit du 7 au 8 novembre, contrairement à ce que les enquêteurs affirment.
"Il n'y a aucun trafic téléphonique entre 04h et 04h20", a-t-il dit. Quand un policier de la sous direction antiterroriste (Sdat) "affirme qu'il a vu le véhicule de Julien Coupat, c'est impossible", selon l'avocat qui s'appuie sur un CD du trafic téléphonique de SFR versé au dossier. "C'est la preuve que la version policière ne correspond pas à la réalité. C'est un élément de plus qui démontre que la version policière est totalement imaginaire et a été fabriquée", a dit Me Assous.

Plainte contre les policiers pour "subornation de témoin"
Les avocats ont aussi annoncé le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile pour subornation de témoin contre les policiers à Clermont-Ferrand, les accusant d'avoir fait pression sur un témoin à charge anonyme quelques jours après les faits. Ils avaient déposé une première plainte simple pour les mêmes faits début 2011. "Voilà deux ans qu'il a été révélé que les policiers avaient grossièrement manipulé l'enquête et fabriqué le témoignage de M. Bourgeois", a dit un autre avocat du groupe, Me Louis-Marie de Roux.
Ce témoin sous X, Jean-Louis Bourgeois, avait peu de temps après son premier témoignage à charge fourni sous son nom une nouvelle version des faits. Les avocats ont aussi mis en cause l'utilisation d'informations fournies aux enquêteurs par un policier britannique "infiltré" au sein du groupe de Tarnac qui se sont révélées "fausses".
De son côté, le député Noël Mamère (EELV) s'est dit favorable à la création d'une commission d'enquête parlementaire sur le fonctionnement des services de renseignement en lien avec l'affaire de Tarnac, en particulier sur le recours aux informations de ce policier britannique.


http://www.letelegramme.com/ig/generale ... tor=RSS-29


http://forum.anarchiste-revolutionnaire ... 712#p80832
Qu'y'en a pas un sur cent et qu'pourtant ils existent, Et qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous, Joyeux, et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout !

Les Anarchistes !
Avatar de l’utilisateur
denis
 
Messages: 913
Inscription: Mer 26 Jan 2011 19:48
Localisation: Oraison, Alpes de Haute Provence, le zéro-quatre

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede skopa le Sam 8 Déc 2012 22:17

J'ai cru lire 4 ou 4 de mes petits papiers...
Merci Denis...
La vie est "rude", mais Pit a raison : j'ai mis mes chaussons sur la tête et je me la coule douce au bord d'une piscine entouré de
2 jeunes'Pop seins nus et 3 jeunes MJS plus avancées dans le corps en corps...
Vive la politique !
skopa
 

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Béatrice le Dim 13 Jan 2013 11:58

Rien ne va plus dans le dossier Tarnac ! Après le juge d'instruction qui a passé la main l'année dernière, les policiers, accusés de mensonges, c'est maintenant du côté des avocats de la défense que les choses tournent vinaigre. Deux des principaux défenseurs du groupe de Tarnac viennent en effet de se désengager du dossier.

http://www.rtl.fr/actualites/info/artic ... 7756733020
Avatar de l’utilisateur
Béatrice
 
Messages: 1133
Inscription: Dim 28 Nov 2010 01:13
Localisation: dans le 04

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede denis le Jeu 31 Jan 2013 23:45

Bonjour!

En février 2012, un ami forgeron était arrêté dans le cadre de
l'affaire dite "de Tarnac". Il s'agissait pour le juge, avec ce nouveau
"suspect", de tenter de faire tenir une construction dont il était le
seul à ne pas voir qu'elle était à terre. Dès son arrestation, nous
avions publiquement pris le pari qu'il sortirait sans inculpation au
bout de 96 heures de garde-à-vue; et ce fut le cas, à un détail près. Au
moment où les policiers lui signifiaient la fin de sa garde-à-vue
antiterroriste, ils l'inculpaient pour avoir refusé de leur donner son
ADN lors d'une interpellation désormais officiellement reconnue comme
nulle et non-avenue. Il fallait, après la médiatisation de son
arrestation, pouvoir dire que celui que l'on avait arrêté sans fondement
sortait tout de même de là avec une "inculpation", fût-elle aberrante.

Notre ami forgeron passe donc le 6 février prochain devant le TGI de
Rouen pour "refus de prélèvement ADN".

Par son absurdité même, ce procès met à nu toute une mécanique à la
fois juridique, policière et judiciaire - celle du fichage ADN, de
l'antiterrorisme, de l'usage des garde-à-vue. Il sera l'occasion de son
démontage en règle. Ce sera en outre le premier procès directement lié à
l'affaire dite "de Tarnac". Nous comptons donc bien y venir à nombreux
et nous comptons sur vous aussi, pour donner comme un avant-goût de ce
que sera le procès de Tarnac, au cas où un juge, un jour, imaginerait
aller jusque-là.

Vous êtes donc tous fraternellement invités à ce procès. C'est à 13H30
le mercredi 6 février au tribunal de Rouen (34 rue aux juifs). Après
l'audience, il y aura un apéritif de soutien dans notre restaurant: La
Conjuration des Fourneaux (149 rue Saint-Hilaire).

Pour trouver les affiches, les explications et tout le reste:
leblogduforgeron.blogspot.fr


A très bientôt, donc!

Le comité de soutien de Tarnac

PS : Nous avons encore et toujours besoin de donations, même petites
pour assurer notre défense ainsi que celle du forgeron. A cette fin,
vous trouverez sur le blog du Forgeron une rubrique « soutenir le
Forgeron ». Il est dorénavant possible en guise de remerciement, de
recevoir en échange d'un don, un objet forgé par le Forgeron lui-même.
Portes-clefs crochets, spirale d'ADN, tout ce qu'il pourra forger, il le
forgera !


http://www.soutien11novembre.org/
Qu'y'en a pas un sur cent et qu'pourtant ils existent, Et qu'ils se tiennent bien bras dessus bras dessous, Joyeux, et c'est pour ça qu'ils sont toujours debout !

Les Anarchistes !
Avatar de l’utilisateur
denis
 
Messages: 913
Inscription: Mer 26 Jan 2011 19:48
Localisation: Oraison, Alpes de Haute Provence, le zéro-quatre

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede de passage le Sam 9 Fév 2013 19:56

[Le Procès du Forgeron] « Qui vole un œuf, viole un bœuf »Posted on 9 février 2013 by juralib


Procès du forgeron de Tarnac : « On incrimine ma volonté »

lu sur http://juralib.noblogs.org/2013/02/09/l ... -un-boeuf/

Pour avoir refusé de donner son ADN aux officiers de l’anti-terrorisme, Charles Torres, « le forgeron de l’affaire Tarnac », lavé de tous soupçons depuis, est passé devant la justice. Le délibéré sera rendu par le tribunal de grande instance de Rouen le 6 mars 2013.

Mercredi 6 janvier 2013, Charles Torres était jugé pour refus de se soumettre au prélèvement d’ADN. Prélèvement demandé par la cellule anti-terroriste lors d’une garde-à-vue justifiée par sa possible appartenance à l’affaire Tarnac. Au moment de cette garde-à-vue, le 23 février 2012, Charles Torres, forgeron de profession, est soupçonné d’être l’artisan des crochets qui auront servi en 2008 à saboter des caténaires de la SNCF.

Le palais de justice de Rouen accueille donc le jour de l’audience du « Forgeron de Tarnac », tous ses soutiens, sa famille et une bonne dizaine de journalistes alléchés par cette audience connexe à l’affaire Tarnac. Quelques policiers, arnaché de gilets pare-balles et de talkie-walkies. Normal, c’est le procès d’une personne qui soupçonnée début 2012 d’association de malfaiteurs dans une entreprise terroriste.

La juge aura dû, en début d’audience faire taire le public venu en nombre pour soutenir Charles Torres. Celui-ci a souhaité lire devant le tribunal « sa plaidoirie » car il n’est « pas très à l’aise à l’oral ». L’homme de 28 ans, spécialisé dans la forge médiévale, a commencé son diatribe timidement, posant la question qui le taraude : « Pourquoi suis-je ici devant vous aujourd’hui ? Je ne le sais pas, personne ne le sait. À part peut-être, l’officier de la DCRI que j’ai vu arpenter ce tribunal aujourd’hui, avec une veste de moto. »

Le forgeron a eu à cœur de pousser les traits d’ironie, malgré sa gêne à parler publiquement. Il s’est même retourné une fois vers l’assemblée pour chercher du regard un soutien. « Adressez-vous au tribunal », le reprendra la juge. Après avoir raconté sa garde à vue, Charles Torres, cultivé et aux mots littéraires, donne ses hypothèses sur les raisons de sa présence devant le tribunal, s’appuyant sur sa connaissance du droit, de l’histoire et sa culture politique. « Dans refus de se soumettre au prélèvement biologique, il y a refus de se soumettre », commence-t-il, « On incrimine ici ma volonté. »

Le forgeron de Roncherolles-sur-le-Vivier explique ensuite pourquoi il s’est refusé à ce prélèvement d’ADN : « Je m’oppose au fichage génétique. » Il rappelle l’historique du Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg) initialement mis en place en 1998 pour ficher les délinquants sexuels, donc les personnes jugées coupables par la justice. Voulant prouver le ridicule de sa présence au tribunal, il se joue de l’adage « Qui vole un œuf, vole un bœuf » : « Qui vole un œuf, viole un bœuf. »

Sans désarmer, Charles Torres continue de justifier son refus de se soumettre, rappelant l’affaire Élodie Kulik, violée puis assassinée (2002). En 2011, les gendarmes parviennent à confondre l’un de ses agresseurs grâce à l’ADN de son père déjà fiché. Le forgeron s’appuiera sur ce détournement du Fnaeg : « Aujourd’hui, donner mon ADN, c’est donner celui de mon frère jumeau, mes parents et mes descendants ». Il conclut : « L’ADN est un instrument de contrôle. » Ce quart d’heure de discours est applaudi par l’assemblée.

lire la suite ici http://juralib.noblogs.org/2013/02/09/l ... -un-boeuf/
"Ne rien dire et surtout ne rien faire quand d'autres sont bâillonnés ou réduits au silence, c'est se faire complice de l'autoritarisme"
de passage
 
Messages: 738
Inscription: Dim 21 Sep 2008 21:26

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Lun 22 Juil 2013 22:15

L'enquête sur une filature contestée paralysée par les policiers Laurent Borredon 19/07

Circulez, il n'y a rien à voir! Selon les informations du Monde, la juge d'instruction qui enquête pour "faux et usage de faux en écriture publique" sur un procès-verbal de filature dans l'affaire de Tarnac s'est heurtée à un mur du côté des policiers de la sous-direction antiterroriste (SDAT) de la police judiciaire et de leurs collègues de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI).
Le "PV104", de son numéro de cote au dossier judiciaire, a été rédigé le 8 novembre 2008 au petit matin. Il rend compte de la filature de Julien Coupat et de sa compagne, Yildune Lévy, qui a mené les policiers de Rueil-Malmaison, domicile des parents de Julien Coupat, jusqu'à Dhuisy (Seine-et-Marne), durant la nuit des sabotages de lignes SNCF, du 7 au 8 novembre 2008. Deux jours plus tard, le couple est interpellé puis mis en examen pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", avec sept de leurs amis rangés par la police dans la "mouvance anarcho-autonome".

Le groupe de Tarnac conteste la véracité du document et la présence de certains policiers, qu'elle soupçonne d'avoir utilisé une balise illégale sur la voiture du couple. De fait, aucun des fonctionnaires présents n'a vu le sabotage lui-même, alors qu'ils étaient une vingtaine, selon eux. Une plainte déposée en février 2011 avait provoqué l'ouverture d'une information judiciaire en novembre 2011. La juge d'instruction Nathalie Turquey avait alors auditionné le rédacteur du PV – un lieutenant de la SDAT – et son chef de groupe. Mais elle avait refusé d'entendre tous les fonctionnaires présents.

A la demande des avocats de Julien Coupat et Yildune Lévy, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles l'y a obligée, autorisant également l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), chargée de la commission rogatoire, à croiser leurs numéros de téléphone de l'époque avec la liste du trafic téléphonique autour du lieu du sabotage. L'objectif étant de vérifier leur présence. Quinze policiers, douze de la DCRI et trois qui étaient à l'époque à la SDAT, ont été entendus. L'IGPN a rendu sa copie à la juge au début du mois de juillet.

LES NUMÉROS DES POLICIERS BIFFÉS

Première déconvenue : la SDAT a assuré à l'IGPN qu'elle n'avait pas conservé le relevé complet des communications émises à Dhuisy, obtenue en 2008 dans le cadre de l'enquête sur le sabotage. Ne subsiste donc que la liste cotée au dossier d'instruction de Tarnac, mais elle n'est que partielle. "Les numéros n'intéressant pas la demande du magistrat ont été biffés pour des raisons de sécurité et de confidentialité", a expliqué le patron de la SDAT. Parmi ces numéros noircis, ceux des policiers. Seul celui du chef de groupe de la SDAT, "attestant de la chronologie de la transmission de l'information à la chaîne hiérarchique", est resté visible. La SDAT aurait donc, étrangement, détruit la liste originale.

De toute façon, les policiers auditionnés ont refusé, de leur côté, de communiquer leurs numéros. Pour les fonctionnaires de la DCRI, entendus anonymement, puisque leur service est tout entier couvert par le secret défense, cela pourrait "compromettre le secret de leur identité". Pas question non plus de dire s'ils ont utilisé leur téléphone.

Les trois membres de la SDAT n'ont pas été plus bavards. "Etant affecté dans un service spécialisé, je pense que la divulgation de telles informations peut être dommageable. Surtout que la divulgation peut toucher un public très étendu. Je suis père de famille et je ne veux que protéger les miens", explique le premier, après avoir pourtant reconnu qu'il avait changé de ligne depuis. Le deuxième et le troisième, qui ne sont plus à la SDAT, ne se souviennent plus de leur numéro de l'époque... et ils n'ont pas pensé à les rechercher avant l'audition.

Tout le reste est à l'avenant. Côté DCRI, les policiers sont bien obligés de reconnaître qu'ils ont participé au dispositif de surveillance. Mais concernant les détails, ils s'abritent derrière "l'article 413-9 du code pénal et suivants protégeant l'organisation, le fonctionnement, les méthodes, les moyens et les personnels de la DCRI". Tout est couvert par le secret défense : la voiture dans laquelle ils ont tourné, les occupants (pourtant également anonymes) de ce véhicule, les moyens utilisés (notamment de vision nocturne).

LE SECRET DÉFENSE, "OBSTACLE À LA MANIFESTATION DE LA VÉRITÉ"

Même si certains disent avoir vu le véhicule de Julien Coupat, il est donc impossible de recouper leurs déclarations. Des propos pas toujours cohérents : aucun de ceux qui ont participé à l'approche "en piéton" du lieu du sabotage n'a vu la voiture du couple. Pourtant, le PV104 assure qu'"une approche piétonne des lieux (...) permet de constater la présence du véhicule, stationné tous feux éteints".

DCRI ou SDAT, les policiers n'ont pas caché, devant l'IGPN, leur mauvaise humeur d'être ainsi auditionnés. "Je suis en colère que notre travail soit ainsi remis en cause", lâche l'un d'eux, qui assure plus tard : "On a fait notre travail. La surveillance a été bien faite."

Interrogée par Le Monde sur ces éléments, Me Marie Dosé, avocate du groupe dans ce dossier, juge "lamentable" l'attitude des policiers. "Se cacher derrière le secret défense, c'est ce qu'il y a de plus facile, ils l'utilisent comme une arme pour éviter toute mise en cause", estime-t-elle.

Pour Me Dosé, il est "impossible" que la SDAT ait tout simplement détruit la liste des communications téléphoniques émises cette nuit-là. Ses clients ont l'intention de déposer une nouvelle demande de déclassification concernant ce document.

"Le secret défense devient, dans ce type de dossiers, le principal obstacle à la manifestation de la vérité", regrette-t-elle. Dans l'autre "enquête sur l'enquête" de Tarnac, qui concerne une écoute sauvage découverte dans le village en avril 2008, la justice s'est également heurtée à ce principe, décidément très élastique.
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

Re: Tarnac : quand la répression s’appelle anti-terrorisme

Messagede Nico37 le Mer 24 Juil 2013 17:16

Fin de l'instruction dans un des volets de l'affaire avec AFP 24/07

Une juge d'instruction a notifié la fin de son enquête dans le volet de l'affaire de Tarnac ouvert à Nanterre pour faux et usage de faux concernant un procès-verbal, a-t-on appris auprès d'une avocate du groupe. "Nous avons reçu une notification de fin d'information" mais "on ne saurait clore ce dossier sans des déclassifications", a déploré Me Marie Dosé, évoquant l'obstacle du secret défense omniprésent dans l'instruction.

En 2008, Le "groupe de Tarnac" est soupçonné d'être à l'origine de sabotages de lignes SNCF sur des caténaires, dans l'Oise, l'Yonne et la Seine-et Marne. Mais les avocats pointent du doigt l'enquête, accusant notamment les hommes de la sous-direction antiterroriste (Sdat) de la police judiciaire et leurs collègues de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) d'avoir menti dans un procès-verbal sur la filature de Julien Coupat et sa compagne Yildune Lévy, crucial pour les impliquer.

Une information judiciaire avait été ouverte à Nanterre - Sdat et DCRI étant établis à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) - pour faux et usage de faux, suite à une plainte déposée par plusieurs des mis en examen du groupe de Tarnac. Le parquet doit désormais prendre ses réquisitions dans ce volet de l'affaire, dans lequel aucune mise en examen n'a été prononcée. La juge d'instruction décidera ensuite d'un renvoi en procès ou d'un non-lieu.

"Les parties civiles n'ont pas été entendues", a également souligné Me Dosé, indiquant disposer de trois mois pour faire demander des actes complémentaires au dossier d'instruction.

Julien Coupat, leader présumé du groupe de Tarnac et sa compagne, Yildune Lévy, ont été mis en examen ainsi que huit autres personnes pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste".

L'enquête sur les sabotages est toujours en cours à Paris, conduite par des juges d'instruction antiterroristes. Une information judiciaire est par ailleurs ouverte à Brive-la-Gaillarde (Corrèze) pour atteinte au secret des correspondances et atteinte à l'intimité de la vie privée, suite à une plainte déposée par ce même groupe de Tarnac.
Nico37
 
Messages: 4787
Inscription: Lun 15 Sep 2008 10:49

PrécédentSuivante

Retourner vers Actualités

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 2 invités