COP21, Paris 2015 : Construire un contre-sommet climat
Négociations climatiques : Vingt-deux, v’là la Cop 21
La conférence annuelle de l’Onu sur le climat a eu lieu début décembre 2014 à Lima au Pérou. Cette « Cop 20 » était la répétition générale de la Cop 21 qui se tiendra à Paris en décembre 2015, et pendant laquelle les gouvernements du monde entier devraient signer un grand accord sur le climat.
La Cop 20 a connu le même déroulement que les précédentes : des négociations difficiles, qui débouchent sur un accord minimum juste bon à maintenir un cadre de négociation. Principaux points de discorde : fixer des objectifs contraignants aux pays en développement qui ont moins de responsabilité dans le changement climatique que les pays industrialisés ; comment financer et utiliser le « fonds vert pour l’environnement », ou encore quelle méthodologie adopter pour évaluer les émissions de gaz à effet de serre (GES) ? Ces questions qui troublent les négociations depuis des années révèlent l’impossibilité structurelle des états à s’attaquer à la crise climatique. Car derrière le caractère international de cette crise, ce sont bien des États qui négocient, et qui défendent avant tout leurs intérêts économiques.
Lima a aussi confirmé l’omniprésence des multinationales dans les négociations. Avec des pavillons dans l’enceinte officielle du sommet et des minisommets parallèles, les multinationales, notamment du secteur énergétique, sont les principales actrices des négociations et bénéficiaires des mesures prises par les gouvernements : soutien à la croissance verte, recherche de solutions technologiques, privatisation de la nature, foi absolue en les mécanismes de marché et les engagements volontaires des multinationales pour résoudre les problèmes écologiques.
Réchauffement de 4 °C
Pendant ce temps, la Chine construit des centrales à charbon à tour de bras, les États-Unis se ruent sur les gaz de schiste, le Canada détruit sa forêt boréale pour accéder aux sables bitumineux, et la France construit des aéroports inutiles. Nous restons donc sur un scénario « pessimiste » où les émissions de GES continuent d’augmenter, ce qui déboucherait sur un réchauffement supérieur à 4 °C d’ici la fin du siècle selon le groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec). Et encore, certains phénomènes ne sont pas pris en compte. Exemple : le réchauffement de la planète entraîne la fonte du pergélisol, vaste étendue de terre gelée qui se trouve au Canada et en Russie. Cette fonte, qui a déjà commencé et devrait s’accélérer dans les prochaines décennies, libère le CO2 et le méthane contenu dans le sol, ce qui contribue à son tour au réchauffement climatique. Ce type de « rétroactions positives », dans le jargon climatique, pourrait entraîner un réchauffement encore bien supérieur à celui prévu.
Les négociations internationales et le capitalisme ont montré depuis longtemps qu’ils ne permettaient pas d’éviter la crise écologique qui se prépare. Bien au contraire, ils l’alimentent.
Jocelyn (AL Gard)
http://www.alternativelibertaire.org/?N ... ques-Vingt Paris 2015 : Construire un contre-sommet climat
La mascarade des négociations internationales convainc de moins en moins, et les mobilisations pour le climat prennent de l’ampleur. D’où l’importance de se préparer à une mobilisation massive à Paris en décembre 2015.
Les mobilisations pour l’écologie, et le climat en particulier, n’ont cessé de grossir ces dernières années. Le contre-sommet lors de la Cop15 à Copenhague en 2009 (où les gouvernements avaient échoué à trouver un accord) avait rassemblé cent mille personnes.
La marche internationale pour le climat de septembre 2014 a rassemblé des centaines de milliers de personnes partout dans le monde. Et à Lima, au Pérou, 400.000 personnes ont défilé, soit la plus grosse manifestation « écolo » en Amérique latine.
En même temps, les revendications se radicalisent à mesure que l’hypocrisie des gouvernements ne peut plus être déguisée et que les luttes sociales et écologiques s’imbriquent de plus en plus. Les slogans et mouvements plus radicaux, tel que le « System change not climate change », semblent prendre le pas sur les courants environnementalistes qui s’accommodent très bien du système.
Une déclaration émanant du Forum social mondial de 2013 identifie ainsi clairement le capitalisme comme responsable de la crise écologique, les états comme les valets du capitalisme, et en appelle (sans grande proposition politique, certes) aux initiatives citoyennes pour reprendre les choses en main.
Des centaines de milliers de manifestants
Une unité nouvelle s’est aussi dégagée parmi les ONG, syndicats et organisations sociales qui participent aux négociations climatiques internationales. Lassées du poids des lobbies et de l’inaction des gouvernements, bon nombre de ces structures quittèrent les négociations lors de la Cop19 en 2013 à Varsovie, et déclarent aujourd’hui, par exemple au travers de la coalition Climat 21, qu’il n’y a rien à attendre des négociations et qu’il faut compter sur la mobilisation citoyenne.
Il y a donc fort à parier que la mobilisation sera massive lors de la Cop21 à Paris en décembre 2015. Il faut s’attendre à des centaines de milliers de personnes, dans un climat de contre-sommet probablement tendu, surtout vu l’attitude du gouvernement français face aux mobilisations sociales et écolos.
La coalition Climat 21, qui regroupe plus de 80 ONG, syndicats et organisations françaises, dispose de moyens logistiques énormes pour préparer le contre-sommet, mais sa diversité l’empêche de définir une ligne politique commune précise. Il est donc probable qu’elle n’appelle qu’à une grosse manifestation, le choix de mener d’autres actions revenant à chaque structure.
Le réseau Alternatiba (qui participe à la coalition) sera aussi mobilisé en 2015. Un tour en vélo sillonnera la France à partir du printemps, l’édition de Paris se tiendra en septembre, et il est question d’organiser un Alternatiba international pendant la Cop. Cette dynamique très mobilisatrice met en avant des alternatives concrètes pour changer notre mode de vie, mais ne représente pas (encore ?) un pôle politique vraiment cohérent.
Quelle place pour les anticapitalistes ?
Il manque donc dans ces mobilisations une dynamique radicale qui n’ait pas peur de la politique, et qui pourrait se coordonner avec les autres dynamiques pour certains événements et organiser ses propres initiatives à d’autres moments, notamment pour occuper l’espace public. Il est évident que de nombreux radicaux, y compris internationaux, seront présents lors de la Cop 21 et organiseront des actions, mais un espace de coordination pourrait être utile pour avoir plus d’impact et resserrer les liens entre les différents courants et pays.
La dynamique Climat social, à laquelle participe Alternative libertaire, souhaiterait être cet espace, mais elle aura besoin d’être grandement renforcée, notamment par les libertaires, pour avoir les moyens d’exister réellement.
Jocelyn (AL Gard)
http://www.alternativelibertaire.org/?P ... -un-contre Sommet climat : Les révolutionnaires mettent le cap sur la Cop
La mobilisation se construit autour de la Cop 21 de Paris (21e conférence des Nations unies sur le climat) en décembre, tandis que les analyses du futur accord soulignent ses impasses. Quels sont, dès lors, les enjeux du contre-sommet ?
Les négociations officielles en vue de la Cop s’intensifient dans les débats internationaux et nationaux : après le fiasco de Lima (endeuillé par l’accord Chine-USA qui verrouille le laisser-faire), ce furent les négociations de Bonn fin mai (deuxième « round » sur quatre), puis un G7 réputé avoir débouché sur des engagements sur la question des centrales à charbon et les autres énergies fossiles (fin des subventions notamment)... Que des promesses en réalité [1], même si plusieurs ONG soi-disant vigilantes ont applaudi à ces purs effets d’annonce, tels Greenpeace ou encore Avaaz, qui crie victoire…pour mieux l’attribuer à ses campagnes.
Démission des états et stratégies d’entreprises
À ces diverses occasions les négociateurs ont fait mine de « travailler » sur les faiblesses de l’accord, ou les mesures à prendre avant 2020, date de sa prise d’effet. Mais les problèmes de fond resteront. En février, après un premier round de négociations, le président de Focus on Global South, Pablo Solon, dénonçait la logique suicidaire que le texte entérinerait [2] , aboutissant à un scénario final à 3 ou 4 degrés supplémentaires d’ici 2030.
Sur deux engagements majeurs et nécessaires, le texte ne dit rien : laisser 80 % du pétrole restant dans le sol ; limiter les émissions de GES à 44 gigatonnes dès 2025 (soit la moitié des émissions actuelles), 35 en 2050. Ensuite, le fonds international pour l’adaptation climatique et les victimes ne contient qu’un dixième des 100 milliards de dollars promis par les États. Enfin, les accords consistent surtout à promouvoir des solutions profitables au capitalisme financiarisé et aux entreprises (marchés carbone, prix du carbone réclamé par les multinationales de l’énergie). On confirme ainsi les mécanismes Redd et Redd+ [3] , malgré leur tendance avérée à privatiser les écosystèmes au mépris des droits des populations. Et les médias de vanter une Cop qui permettrait un bras de fer sur la « responsabilité différenciée » de la crise entre puissances dominantes et pays pauvres.
On ne dira donc jamais assez le cinéma que constituent les conférences. Il n’y a qu’à regarder du côté des sponsors de la Cop 21 (de Total à Ikea en passant par Coca-Cola) pour comprendre à qui profite la transition énergétique capitalo-compatible : aux grands pollueurs qui, partiellement convertis aux « énergies vertes », espèrent à la fois une stagnation et un coup de pouce en direction de leurs installations (éoliennes offshore de Veolia, filiale Engie d’EDF…), ou de leurs investissements dans le droit à polluer.
Quelles ambitions pour le contre-sommet ?
La Coalition climat (ONG, syndicats et autres) mobilise pour le contre-sommet de décembre (voir encadré). Son aile droite croit encore « mettre la pression aux États », mais la majorité du mouvement tâche plutôt de saisir l’opportunité d’une prise de conscience de l’opinion, sur le climat et l’ensemble de la crise écologique. Précisons au passage que, si des luttes sont directement nées de la préoccupation climatique, comme la Transition, très active en Angleterre, le front pour le climat cherche encore sa cohérence à travers la convergence des luttes sous la bannière de la « justice climatique » (gros réseau Climate Justice Now qui s’internationalise), plus ou moins globales et radicales dans leur mise en évidence des contradictions du système : dénonciation des conflits et des migrations forcées liées au climat, appel au désinvestissement dans les énergies fossiles (action des Amis de la Terre sur EDF), lutte contre l’évasion fiscale (Désobéissants sur la BNP), contre la pub ou l’éclairage abusif, pour l’agriculture paysanne, contre les dégâts de l’agro-industrie, contre les accords de libre-échange… Le contre-sommet se présente donc comme l’aboutissement de quelques mois de campagne pour toutes ces luttes, que la Coalition tente de coordonner jusqu’au raout final du Bourget. Exemple les 13 et 14 juin où les journées consistaient en groupes de travail par thèmes ou dates d’action durant la Cop.
En l’absence de plate-forme politique, les mots d’ordre qui dominent la Coalition finissent par lui donner une orientation : angle d’attaque par les inégalités économiques notamment, forts mouvements de désobéissance non-violente (J.E.D.I pour le climat, Climate Games de John Jordan qui consistent à mener des actions réelles sous forme de jeu). Mais cette souplesse a ses défauts, certains acteurs tenant parfois des discours contraires à leur vraie ligne politique (CFDT), et certains problèmes restant minorés, preuve d’une absence d’analyse d’ensemble, comme la lutte antinucléaire pour l’instant. Pour finir, le travail sur l’éventuelle répression se fait sûrement mais n’est pas partagé en atelier.
La question de l’après-COP
Puisque le contre-sommet n’a pas d’enjeu en termes de rapport de force, bien des mouvements (groupes et ONG issus du « Walk out » de Varsovie, activistes ou autonomes) cherchent à en faire plutôt un ultimatum, un moment ou un point de départ d’une opposition plus durable et organisée. Cette volonté serait symbolisée par un gros blocage sur des lieux de production ou de commerce le 12 décembre (il y aurait 12 000 volontaires pour une action d’ampleur), la Coalition souhaitant éviter la gueule de bois de Copenhague. D’autres volontés se coordonnent cette fois en dehors de la Coalition. Certains comptent sur les Climate Games (à Amsterdam le 4 juillet, à Paris du 7 au 12 décembre), d’autres sur les divers camps politiques de cet été (rassemblement à NDDL, Bure, qui cherche à dépasser l’activisme, Altmark, camp climat de Rhineland…) pour construire de vrais mouvements. Pour l’instant il est difficile de prévoir la réussite de ces différentes initiatives, et même d’en évaluer la radicalité, mais un mouvement anticapitaliste concret, visant une vraie résistance, cherche à se mettre en place à la marge de la Cop.
En tant qu’organisation politique, Alternative libertaire ne rejoint pas en tant que telle la Coalition. Mais nous nous inscrivons d’ores et déjà dans certains collectifs locaux (Alternatiba, forum locaux comme à Montreuil) ainsi que dans les réflexions syndicales en prévision de la COP, de manière à porter une analyse globale, anticapitaliste et révolutionnaire de la crise écologique.
Mouchette (commission écologie)
[1] blogs.mediapart.fr/blog/maxime-combes/090615/linertie-du-g7-prepare-de-nouveaux-crimes-climatiques-decryptage.
[2] Le texte est la somme des propositions amenées par les divers États, les négociations consistant à nettoyer le texte.
[3] Mécanisme finançant la préservation des forêts du Sud, en valorisant leur fonction de captation du carbone ; des investisseurs y gagnent des « certificats de réduction d’émissions » valorisables sur les marchés carbone, et surtout opposables aux droits des autochtones.
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